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Introduction à l'ouvrage de John Major Jenkins

"Maya Cosmogenesis 2012

Terence McKenna

Traduction de Dominique Guillet


Nous vivons actuellement une période de changements énormes et indiscutables. Et c'est le bouleversement profond qui constituait, à l'époque avant que la technologie mécanisée ne gouverne le monde, le domaine privilégié des initiés, des shamans et des prophètes. Grâce aux sciences modernes de l'archéologie et de l'analyse linguistique, nous avons passé au crible les mondes du passé pour y déceler des informations, des idées et des visions qui puissent éclairer notre propre dilemme. Je considère que les héritages les plus conséquents et les plus durables, que nous aient légués ces époques anciennes, sont le calendrier Maya et le Yi King. Ces deux inventions, lorsqu'elles sont judicieusement appréhendées, rapprochent notre être des sources de toute vie.

Il est surprenant de découvrir, lors de nos investigations du passé, une compréhension de notre futur immédiat. C'est un phénomène sans précédent qui nous emplit d'émotion, de révérence et d'excitation intellectuelle. Notre planète est dans un processus d'auto-transformation; ce processus est dans une phase critique et dans la mesure où nous pourrons élargir nos écrans mentaux afin d'intégrer le contexte, en extension permanente, dans lequel se situent nos vies et nos civilisations, nous pourrons participer, en toute gratitude, à un grand saut en avant de la révélation du Tao.

Tous ces concepts étant une force d'impulsion sur mon propre chemin, ce fut naturellement avec un très grand plaisir que j'acceptai l'invitation de l'érudit et voyageur, John Major Jenkins, de rédiger l'introduction à son ouvrage Maya Cosmogenesis 2012, une oeuvre révolutionnaire de découverte et de synthèse. En 1975, ainsi que Jenkins le rappelle aimablement, je fus le premier à réaliser et à suggérer dans un ouvrage (The Invisible Landscape) que “à notre époque, le solstice d'hiver est placé dans la Constellation du Sagittaire, à environ 3 degrés du Centre Galactique qui est également, par coïncidence, à moins de 2 degrés de l'écliptique. De par la précession, le solstice d'hiver se rapproche de plus en plus du point sur l'écliptique où il éclipsera le Centre Galactique”. Tout comme Jenkins, j'avais été profondément inspiré par les visions et les spéculations présentées par Giorgio de Santillana et Hertha von Dechend, dans leur ouvrage novateur Hamlet's Mill, publié en Anglais en 1969, et en particulier la notion essentielle du lever héliaque du solstice en conjonction avec le Centre Galactique.

Le chemin qui m'amena à cette découverte fut différent de celui de Jenkins, ce qui valide d'autant plus nos conclusions respectives. Dès 1974, j'avais pris conscience de l'approche de l'alignement du soleil solsticiel avec le Centre Galactique, et de son potentiel en tant que période de régénération, mais, étonnement, c'était bien avant que je ne réalise que les shamans-astronomes des Mayas/Olmèques en étaient venus aux même conclusions plus de deux millénaires auparavant. C'est une séquence logique différente qui me conduisit vers les mêmes événements célestes et ce même moment dans le temps dont je reconnus le potentiel de transformation.

Au début des années 1990, alors que je correspondais avec John Jenkins, nous discutâmes de la possibilité que la date finale du Grand Cycle des 13 baktun avait été intentionnellement choisie par les Mayas en raison de la conjonction du soleil avec l'intersection de l'écliptique et du plan de la Voie Lactée le 21 décembre 2012 - le 13.0.0.0.0 du calendrier du Grand Compte. Dans l'édition révisée de 1993 de mon ouvrage The Invisible Landscape, j'affirmai que la date finale de mon modèle de cosmos révélé par le champignon était identique à celle du calendrier Maya et que le calcul de cette date avait été réalisé par des méthodes différentes de celle des Mayas que je ne connaissais nullement.

Dans ce présent ouvrage, John Major Jenkins a pu conférer à une situation académique complexe, mais néanmoins fascinante, une description beaucoup plus détaillée et une plus grande clarté de compréhension. Il a clarifié et développé ces intuitions basiques et a réellement réussi à authentifier l'intention fondant le calendrier Maya et sa date de fin de cycle. C'est un accomplissement notoire, du même niveau que le déchiffrage des textes Mayas qui fut concomitant avec les conclusions de Jenkins et qui les a enrichies. Il s'est consacré à cette thématique pendant de très nombreuses années et sa grande expertise a porté des fruits étonnants. En se fondant attentivement sur des travaux antérieurs, il a démontré que l'intention des inventeurs du calendrier Maya était prophétique et eschatologique. Les Mayas croyaient, pour des raisons qui sont peut-être à jamais perdues, ou qui seront peut-être bientôt révélées, que la conjonction du soleil solsticiel d'hiver avec la région de la Voie Lactée, qu'ils appelaient Xibalba be, ne serait pas, comme certains l'on prétendu, la fin du monde mais son moment de création authentique. Les Mayas croyaient que la création ne se manifesterait véritablement qu'à un moment prédictible dans le futur: le 21 décembre 2012.

Dans Maya Cosmogenesis 2012, Jenkins a montré que cet alignement précessionnel du soleil solsticiel d'hiver avec la galaxie est le phénomène de la nature à partir duquel les Olmèques/Mayas ancrèrent leur magnifique calendrier. Maya Cosmogenesis 2012 nous invite à poser cette question plus profonde: “Pourquoi?”. Cette question serait intéressante en toutes circonstances; pour nous, à notre époque, elle est doublement intéressante parce que, par chance ou à dessein, nous vivons réellement durant la fin de cycle anticipée par les anciens shamans-prophètes Mayas. Leurs ossements et leur civilisation ont disparu depuis longtemps dans la matrice Gaïenne qui revendique tous les enfants du temps. En effet, leurs cités étaient déjà des nécropoles spectrales à l'époque où les conquistadores Espagnols les contemplèrent pour la première fois, il y a 500 ans. C'est cependant notre époque qui fascina les Mayas et c'est vers notre temps qu'ils portèrent leur regard extatique bien qu'il se situât à plus de deux millénaires dans le futur à l'époque où ils consignèrent les premières dates du Compte Long.

C'est à faire dresser les cheveux sur la tête. Il serait trop aisé pour notre civilisation, avec son culte de l'éphémère et du matériel, de louper le coche. Et il est d'autant moins facile d'apprécier les Mayas à leur juste valeur que les fantaisies archéologiques spécieuses du Nouvel-Age ont jeté le discrédit sur toutes les connaissances anciennes qui ne découlent pas des sources putatives de la Lémurie perdue, de l'Atlantide et de royaumes encore plus douteux de la très haute antiquité. Les Mayas invalident tout cela avec la même aisance déconcertante qu'ils invalident l'Eurocentrisme et la condescendance de l'archéologie académique. Les Mayas constituent réellement une ancienne civilisation qui a sans doute fait des découvertes plus essentielles et atteignit à une compréhension plus profondes que les nôtres dans des domaines que nous avons été enclins à proclamer comme notre chasse gardée.

C'est la nouvelle étonnante dont Jenkins nous fait partager: l'astronomie moderne n'est apparemment pas la première communauté d'érudits à évaluer et à étudier la structure du cosmos élargi. Nous pouvons nous émerveiller de la “coïncidence” entre la découverte, par nos propres physiciens, d'un trou noir au centre de notre galaxie et la croyance Maya d'un grand trou noir au même endroit, et passer totalement à côté. Ce n'est pas une coïncidence. Notre mental et nos mathématiques ne sont pas à ce point différents de ceux des Mayas que notre science et la leur ne puissent pas arriver aux mêmes perspectives, par des voies diverses mais cependant convergentes.

Ceci étant dit, qu'en est-il de la prédiction/découverte/hypothèse de l'année 2012 en tant que période de métamorphose du monde? Tout d'abord, existe-t-il quelque fondement scientifique pouvant expliquer l'attente de phénomènes physiques inhabituels lorsque le soleil solsticiel d'hiver “se tient” sur le Centre Galactique? La science d'aujourd'hui répond par la négation. Mais la science, au contraire de la religion, est en évolution permanente et en constante révision de ses propres simplifications passées. La structure en spirale de la galaxie et les structures en spirale des molécules qui créent et maintiennent toute vie existent-elles dans une relation de résonnance? C'est un sujet d'investigation. “Comme en-haut, en-bas”, enseignèrent les alchimistes de nos propres traditions ésotériques. La perception des Mayas selon laquelle l'homme est le miroir du macrocosme était-elle pour eux plus qu'une métaphore? La destinée humaine et le drame plus universel de la galaxie sont-ils liés de quelque manière? Il n'est peut-être pas aisé de valider des mécanismes de corrélation mais il reste que la nouvelle science des dynamiques se consacre à l'élucidation des mécanismes subtils de corrélations.

Il n'est nul besoin des Mayas et de leur calendrier prophétique pour savoir que nous vivons à un moment où les chemins du monde sont martelés et reforgés sur l'enclume de la destinée. Notre propre calendrier, rationnel quant à sa conception et sa finalité - et dont la fin de millénaire est proche - oriente inévitablement notre attention vers des échelles plus vastes de durée et des potentialités plus étendues d'être que celles qui suscitèrent l'attention de nos ancêtres récents. Nous savons que nous sommes parvenus à un moment de transformation et de renouveau. Il nous faut, à cette époque plus que toute autre, comprendre - et nous en inspirer - la foi des Mayas selon laquelle notre époque - celle qui est en gestation - est le temps de la création authentique. Car il doit en être ainsi.

Au fil des millénaires, les Mayas observèrent le drame de l'approche du Père Soleil vers le vagin de la Mère Ciel et, malgré le fait qu'il eût été calculé que l'événement cosmique se produise de nombreux siècles plus avant dans le futur, ils firent de cette conjonction future le point d'ancrage de leur mécanisme de chronologie cosmique. Leur mythe - ils diraient le mécanisme de la destinée cosmique - choisit notre époque comme le moment quintessentiel de la création. Et, en réalité, notre époque a vécu dans cette attente. Pour l'esprit rationnel, cette conjonction est une coïncidence de peu d'intérêt pour ne pas dire sans intérêt. Cependant, en déchiffrant les monuments et les textes des Mayas Classiques, il devient de plus en plus clair qu'ils imaginèrent un monde gouverné par les mythes, ils perçurent les mythes comme les principes directeurs primordiaux de la civilisation et de l'organisation des sociétés. Les Mayas cherchèrent à transformer et à influencer l'histoire au travers du pouvoir du mythe et leur mythe le plus puissant fut le mythe du drame précessionnel et du renouveau de fin de cycle. Sur le plan collectif, à l'aube du 21 ème siècle, nous ressentons l'ennui et l'épuisement de la pratique millénaire de la science, de la politique et de la religion Occidentales; nous sommes confrontés à la pollution et à l'empoisonnement qui sont l'héritage de notre mode particulier d'être dans le monde. Et nous trouvons aussi, dans le bric à brac gigantesque du marché spirituel, le calendrier cosmogénique des Mayas. Leur alchimie temporelle peut-elle fonctionner pour nous alors qu'elle a failli à l'époque de leur apogée culturelle et qu'elle laissa des cités désertées au temps de la conquête? Le rêve Maya de régénération, à la conjonction du soleil solsticiel d'hiver et du Centre Galactique, peut-il sauver notre civilisation? Je crois qu'il peut jouer un rôle important et qu'une partie de la resacralisation, qui doit accompagner toute valorisation du temps post-historique, implique la reconnaissance de la puissance et de la sophistication profondes de l'esprit Aborigène - non seulement l'esprit Aborigène antique mais tout aussi bien l'esprit Aborigène contemporain.

C'est en nous éveillant au pouvoir du ciel qui se meut, en nous éveillant aux puissances qui informent et qui illuminent les nombreuses plantes qui sont partie intégrante de la médecine Aborigène, c'est en nous efforçant de comprendre la vastitude de l'univers spatio-temporel et la place que nous y occupons, c'est en réalisant tout cela que nous suivrons le chemin des Mayas. Ce faisant, nous devrions rendre hommage à la sagesse des Mayas, apprécier sa profondeur et nous émerveiller de sa perception la plus durable: que le monde naisse enfin le 21 décembre 2012.

Terence McKenna

Honaunau, Hawaï. Janvier 1998.