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Celle qui Oint

John Lash

Télécharger l'essai avec les illustrations.

Traduction par Dominique Guillet

Voir notre page "La Vengeresse Gnostique dans l'Art" pour consulter quelques illustrations, dans l'art, de Madeleines qui sont "impénitentes" et qui ne sont pas en pâmoison devant le symbole mortifère du Christianisme, la croix.

L'Evangile de Marie de Magdala par Karen King. The Gospel of Mary of Magdala: Jesus and the First Woman Apostle, 2003 (Polebridge Press).

Karen King, Professeur d'études ecclésiastiques à Harvard Divinity School, a en ce moment le vent en poupe. Durant les huit dernières années, elle a publié trois ouvrages majeurs sur les études Gnostiques: Revelation of the Unknowable God (1995), What is Gnosticism? (2003) et l'ouvrage dont nous faisons la recension dans ce présent essai. Revelation of the Unknowable God, le résultat de dix-sept années de recherches, est sa traduction et son analyse en profondeur d'un discours de révélation issu des Codex de Nag Hammadi. C'est une cache de documents, communément considérés comme Gnostiques de nature, découverts dans une grotte en 1945 et rendus accessibles en Anglais en 1979. Revelation of the Unknowable God établit fermement Karen King à la pointe de la nouvelle génération d'érudits du Gnosticisme. Dans son ouvrage What is Gnosticism?, le Professeur King aborde la problématique traitée dans l'ouvrage controversé de Michael A. Williams Rethinking Gnosticism (1996) et soutient largement son argumentation selon laquelle le terme Gnosticisme devrait être éliminé de la terminologie et des débats. Dans l'ouvrage, dont je fais ici la recension elle déclare, que “je n'appelle jamais l'Evangile de Marie un texte gnostique parce que le Gnosticisme n'a jamais existé en tant que tel” (page 156).

Ce sont bien sûr des sujets de discussion pour experts et l'Evangile de Marie de Magdala est un ouvrage écrit par une érudite à l'usage d'autres érudits mais, néanmoins, certains sujets sont beaucoup trop importants pour qu'on en laisse l'exclusivité aux autorités reconnues. Pour l'érudit Madeleinien aux convictions Gnostiques que je suis, il est à la fois alarmant et douloureux d'être témoin de l'intérieur, de ce que King, et les autres qui la suivent, sont en train de faire avec Notre Dame de Sagesse. Les problématiques soulevées par son ouvrage possèdent des répercussions considérables quant à la perception générale de Madeleine dans la culture populaire et dans l'imagination collective de notre temps.

La manière dont Madeleine a été dépeinte par l'imagination populaire comme triste, maussade et souffrante (pleurant comme une “Madeleine”) peut être perçue avec un autre éclairage. Ne se pourrait-il pas qu'elle soit immergée, non pas en pénitence, mais dans la douleur? En raison de tout ce que nous avons perdu. En raison de notre communion avec Gaïa détruite. En raison de la sagesse pervertie. Elle n'est peut-être pas désolée pour ce qu'elle a fait mais pour ce que nous nous faisons à nous-mêmes. (Peinture de Jusepe de Ribera).ont color="#3300cc"> fa

Disciple ou Amante

Bien que Marie Madeleine se révèle comme un personnage très vivant dans la tradition Européenne (voir également ma recension du Da Vinci Code), les Evangiles conventionnels ne nous apprennent quasiment rien de sa vie ou de sa personne. La profusion de Maries dans le Nouveau Testament constitue une énigme pour les érudits tout autant que pour la culture populaire. King résume toutes les allusions, et les allusions présumées, à Marie Madeleine dans le Nouveau testament mais il n'en émerge réellement aucune image cohérente. Cela s'avère impossible de déterminer si Madeleine peut être placée parmi les femmes associées à Lazare, que Jésus ressuscita des morts, ou parmi les femmes rassemblées sur le Golgotha pour assister à la Crucifixion. On ne peut pas non plus l'identifier avec certitude avec la femme dont Jésus chasse les sept démons ou bien avec la femme qui parfuma les pieds de Jésus et les essuya avec ses propres cheveux. Un seul point d'identification semble faire le consensus. L'Evangile de Jean (20:15) indique qu'elle fut la première personne à rencontrer Jésus le dimanche de Pâques, en le prenant apparemment (en raison de son état ressuscité?) pour la jardinier.

Donc, finalement, quelle sorte de portrait pouvons nous dresser à partir de ces indications textuelles? Passant en revue les indications émanant de sources non-Gnostiques, King dépeint Madeleine comme une disciple importante, et du début, ainsi qu'une leader du mouvement Chrétien primitif et elle dissocie ce personnage respectable de la prostituée repentante de la tradition populaire. Elle affirme que l'Evangile de Marie (dans le Codex de Berlin, BG 8502, la matière principale pour les sources de son livre) présente Madeleine dans un rôle qui est plus fidèle à sa position réelle dans l'histoire Chrétienne primitive, (page 149) plus fidèle, c'est à dire, que dans son rôle de prostituée repentante. Cette interprétation a pour effet d'élever le statut de Madeleine en la désassociant de cette image tapageuse et en mettant en exergue son influence quant à sa participation réelle à la formation historique du Christianisme.

Tout cela peut sembler de bon augure pour Madeleine, mais l'est-ce véritablement? Que cela soit voulu ou non, l'étude de King a pour effet de démarginaliser Marie de Magdala afin qu'elle devienne plus acceptable dans les courants conventionnels du Christianisme. Elle n'est plus une marginale, elle n'est plus un personnage exotique et menaçant dans l'arrière-scène de la Passion. Elle est maintenant élevée au rang de première femme apôtre, ainsi que le sous-titre de l'ouvrage le stipule. Cela est préférable à sa réputation de prostituée.

Mais comment cette femme troublante et séduisante, un personnage mystérieux qui a hanté l'imagination Occidentale pendant des siècles, voit-elle son image affectée par sa transformation en une apôtre fidèle de Jésus? La réponse dépend, bien sûr, de ce que l'on pense de Jésus et du message qu'on lui attribue. Elle dépend également de la manière dont on perçoit les conceptions Gnostiques de Jésus Christ, conceptions condamnées comme hérétiques par les premiers propagateurs de la doctrine Chrétienne. Si Marie de Magdala est considérée comme une apôtre fidèle du Jésus révéré par la foi conventionnelle, le sauveur des cours de catéchisme, qu'advient-il de Madeleine l'hérétique, la compagne Gnostique de l'autre Jésus?

Et qui est cet autre Jésus?

Selon un texte Gnostique, l'Evangile de Philippe, Jésus est un sage illuminé qui témoigne d'une affection déclarée pour son amante, Marie de Magdala (appelée aussi Myriam), en l'embrassant sur la bouche en public, à la grande consternation de son entourage mâle. Elle est la koinonos, la compagne du maître Gnostique, sa complice la plus intime dans l'amour et la vie. Les textes Gnostiques mettent clairement en évidence que leur complicité est à la fois spirituelle et sexuelle. L'épisode du baiser sur la bouche dans l'Evangile de Philipe est un scandale mineur en comparaison d'un autre texte qui décrit l'union sexuelle de Jésus et de Marie dans les montagnes et leur discussion au sujet de la sexualité orale. (dans les Questions de Marie, un texte perdu paraphrasé par Epiphane. Edgar Hennecke, New Testament Apocrypha, page 328/329).

King remarque, de façon laconique, que la notion de relation sexuelle entre Jésus et Marie Madeleine a émergé à la surface lors de périodes étranges dans l'histoire Européenne et qu'elle est encore susceptible de déclencher des émeutes. Si l'on se fie à la popularité de l'ouvrage de Dan Brown, il semblerait que nous soyons au coeur d'une de ces périodes étranges. Au risque que King, et d'autres érudits de son niveau d'expertise, ne soient pas d'accord, cette liaison illicite, et blasphématoire selon certains, fait du sens dans un contexte à la perspective historique plus étendue que ce qu'elle considère. Les érudits de la Bible et du Gnosticisme ne s'échappent que rarement de leur champ d'expertise et on peut donc les excuser de n'avoir pas perçu la nature Tantrique de la relation supposée entre Jésus et Madeleine. Il est vrai que les érudits qui ne sont pas au fait des traditions millénaires du mysticisme sexuel Asiatique (Hindou, Chinois, Tibétain) sont loin de pouvoir imaginer que dans ces anciennes pratiques, lorsqu'elles sont accomplies correctement, le partenaire féminin du maître est le maître véritable.

Le Déni de la Gnose

En termes Gnostiques, Jésus est un telestes, un initié des Mystères. Les Ecoles Païennes de mysticisme expérimental existaient dans tout le monde classique de l'Irlande à l'Egypte et leur origine remonte bien avant l'ère Chrétienne. Le mouvement Chrétien primitif s'établit dans le monde Païen alors que les Mystères exerçaient encore une influence considérable. En tant que telestes, Jésus est un mortel ordinaire doté d'une connaissance extraordinaire, la fleur de la Gnosis, la connaissance transcendante. C'est un phoster, un illuminateur qui amène un message de libération de l'erreur et de l'illusion et non pas un message de rédemption du péché.

Le Jésus Gnostique est un instructeur inspiré qui ne prétend pas être une divinité capable, par sa mort, de sauver le monde, en changeant la nature de la souffrance humaine, et en altérant le cours de l'histoire. La plupart des textes Gnostiques, mais pas tous, rejettent fermement la notion de résurrection et certains passages des Codex de Nag Hammadi tournent même franchement en ridicule la croyance enla rédemption associée au nom d'un homme mort (Apocalypse de Pierre, 74:13-21). Les Gnostiques, qui dénoncèrent l'émergence du Christianisme, mirent en garde contre le fait que par ce type de foi aveugle, les humains seraient complètement profanés et sombreraient dans l'erreur, et même sous l'emprise du mal, et seraient subjugués de façon perverse (Apocalypse de Pierre).

Lorsque Karen King déclare que le Gnosticisme n'existe pas, elle s'exprime en tant qu'érudite qui émet un jugement sur une notion catégorielle, un “isme” inventé durant le 19 ème siècle; mais ce faisant, elle risque aussi d'occulter le phénomène culturel et religieux indéniable et concret auquel le terme Gnosticisme fait référence. Sa fin de non recevoir dédaigneuse du Gnosticisme s'apparente à un déni de la Gnose, le chemin d'illumination de la spiritualité Païenne, comme si un tel chemin n'avait jamais existé ou bien, s'il avait existé, comme s'il était non pertinent. Mais une tradition riche, et très âgée, de spiritualité pré-Chrétienne, proche du mysticisme Asiatique, culmina dans le phénomène catalogué par le terme Gnosticisme, dont on pourrait faire de nos jours l'économie. Et il est clair qu'il n'est ni aisé, ni sage, d'écarter d'un revers de la main l'héritage conféré à l'humanité par la Gnose.

Le chemin de l'illumination ne pourvoit pas une cure magique aux souffrances humaines même s'il offre des perceptions sur les facteurs, ô combien humains, qui nous font souffrir et infliger de la souffrance à autrui. Selon un des textes de Nag Hammadi, “l'ignorance est la mère de tous les maux”. Les Gnostiques considèrent que c'est l'erreur, et non pas le péché, qui constitue le problème fondamental auquel doive faire face l'humanité. De telles distinctions caractérisent la protestation Gnostique contre les doctrines Rédemptionnistes Chrétiennes et, par inférence, affectent la manière dont nous percevons Madeleine en tant qu'instructrice Gnostique de plein droit.

Mais de telles considérations ne sont pas effleurées par Karen King. Elle soutient, plutôt, que les premiers pères de l'église, qui s'opposèrent avec véhémence aux écrits gnostiques, présentent Madeleine, de façon consistante, sous un jour favorable. Elle est généralement mentionnée pour valider les points qu'ils tentent de faire passer quant à la réalité de la résurrection physique ou quant à la nature de l'âme (page 149). En d'autres mots, Madeleine est acceptable pour autant qu'elle cautionne la croyance doctrinale en la succession apostolique. Ainsi non seulement King rejette-t-elle le terme de Gnosticisme mais, qui plus est, elle affuble l'emblème féminin de la Gnose d'une aura anti-Gnostique.

Vertus Païennes

King met sur la touche la prostituée pénitente, comme nous l'avons souligné ci-dessus, pour mieux la réintroduire comme un modèle de faiblesse:

“Le rôle de la prostituée repentante est symboliquement attractif en soi. Il s'est avéré être une image beaucoup plus évocatrice que celle de Marie femme ou amante de Jésus. L'image de Marie en tant que pécheresse rachetée a nourri une empathie profonde qui résonne avec notre imperfection, notre fragilité et notre mortalité humaines. La figure de la rédemptrice déchue possède une énorme puissance de rédemption” (page 153).

Dans cette prouesse astucieuse de co-optation érudite, King assimile Madeleine à la totalité du programme de valeurs Rédemptionnistes, et d'attributs quasi-magiques, incluant sa carte maîtresse, la valeur rédemptrice de la souffrance. Un ami proche m'a aimablement informé que le mot Païen est très peu usité si ce n'est dans des débats ésotériques chez les érudits. J'offre, néanmoins, mon humble contribution à la définition d'un aspect-clef de la spiritualité Païenne qui soit intimement corrélé au mythe et à la personne de Madeleine. En opposition à la glorification de la souffrance au travers du sacrifice du Messie racial (Juif) ou du Divin Rédempteur (Chrétien), le Paganisme n'attribuait aucune valeur rédemptrice à la souffrance même s'il concédait que la souffrance possédait une profonde influence d'empathie, similaire à celle de l'amour. Dans la vision Païenne, la souffrance nous enracine en tant qu'individus dans la condition humaine universelle et elle nous enseigne des leçons cruciales quant à la manière d'être sain et humain.

En évaluant Madeleine (même sous une lumière en apparence positive) à l'aune de systèmes de croyances non-Païennes, King rend difficile, pour quiconque n'est pas versé dans les textes et les conceptions Gnostiques, de prendre conscience que Madeleine puisse représenter un tout autre système de valeurs tels que l'honneur, le respect de soi, l'indépendance, la beauté personnelle et intérieure, le courage physique et moral et l'acceptation sereine de la souffrance en tant que fait inévitable de l'existence humaine et non pas comme un vecteur de transcendance. La souffrance d'être né avec dignité plutôt que d'être méprisé comme une malédiction divine en besoin de rédemption par une puissance supérieure. Imaginons cela: Madeleine en tant que parangon des vertus Païennes. Mais comme nous le savons tous, parce qu'on nous l'a rabâché, il n'existe pas de vertus Païennes et d'enseignements Gnostiques dignes de ce nom.

King continue:

“Et certes, Marie Madeleine a été une figure importante non pas seulement pour le patriarcat alors que trop souvent la louange par Grégoire d'une femme, qui s'est immolée afin de purifier par le feu jusqu'au dernier plaisir qu'elle avait en elle-même, a généré des angoisses considérables, une auto-destruction et des abus physiques. Cependant, les femmes ne sont pas seulement des victimes, mais comme tout le monde, sont des agents de leur propres vies et c'est ainsi que les femmes l'ont souvent interprétée selon des voies inattendues et parfois pas totalement les bienvenues. Du second au vingt et unième siècles, les prêcheuses et les prophétesses ont continué de s'y référer pour légitimer leur propre rôle d'autorité.” (page 153).

Dans l'interprétation qui est donnée ici, Marie Madeleine a contribué de façon essentielle au système de domination patriarcale même si elle a conféré la force aux femmes d'assumer des rôles d'autorité au sein de ce système ou contre ce système. (Je n'ai rencontré, d'ailleurs, que peu de femmes qui, s'identifiant à Marie Madeleine, considèrent que leur vocation soit d'être acceptée au sein du système de domination). Quant à la prostituée pénitente qui s'immole et qui purifie par le feu jusqu'au dernier plaisir en elle, je suggère que cette image se superpose, de façon perverse, à celle d'un nombre incalculable de femmes qui ont été immolées pour cause de “sorcellerie”, qui ont été brûlées parce qu'elles étaient consumées par le plaisir et la tendresse, parce qu'elles adoraient leur propre sensualité, parce qu'elles apprenaient des mystères de la nature, parce qu'elles enseignaient la nature sacrée de la Terre et qu'elles guérissaient grâce à ses pouvoirs, et précisément parce qu'elles ne refusaient pas le plaisir dans leurs corps, et la sagesse qui en émane, mais plutôt parce qu'elles l'incarnaient, le partageaient et le célébraient. Pour de nombreuses femmes d'aujourd'hui, voilà la source d'inspiration incarnée par Marie de Magdala. C'est également l'interprétation de sa personnalité qui soit la plus cohérente avec la plupart des enseignements Gnostiques. Il n'existe pas la moindre allusion à une telle femme dans l'ouvrage de King.

La Mystique de Madeleine

King construit son immense échafaudage sur l'évidence textuelle ténue de l'Evangile de Marie, un texte en dehors des Codex de Nag Hammadi, qui fit surface à Berlin en 1896. Quatre versions fragmentaires existent mais même la plus longue, Berolinensis 8502, connue sous le nom de Codex de Berlin, est dépourvue de ses six premières pages. La traduction par King de la compilation de plusieurs versions ne remplit même pas cinq pages de son livre. C'est avec beaucoup d'habileté qu'elle a recours à des brefs passages et à même des mots uniques de la compilation de Berlin afin d'extrapoler la personne et la mission de Marie de Magdala comme la première femme apôtre et la plus fidèle. Dans son inventaire des références textuelles ou des références supposées à Madeleine, elle ignore largement la matière Gnostique qui pourrait être citée pour brosser son portrait dans une perspective bien différente.

Mais si le Jésus Gnostique est un messager de l'illumination, et non pas un messie dont la souffrance rachète le monde, la souffrance attribuée à la prostituée pénitente peut receler une signification différente. L'ouvrage de King est ainsi une oeuvre remarquable d'exégèse érudite sur le texte qu'elle a choisit mais une interprétation extrêmement limitée et désorientante de Madeleine. Quoi que puissent en penser les érudits, Marie de Magdala est porteuse d'une mystique qui dépasse le cadre des discussions historiques et textuelles. Cette femme est numineuse. Dans le travail de King, ce que l'on pourrait appeler la dimension mythique de la personnalité de Madeleine (en termes Jungiens, sa puissance archétypique) a été démolie, en même temps que l'environnement Gnostique et Païen à l'aune duquel elle peut être évaluée.

Dans la Sophia de Jésus Christ, Madeleine (appelée Myriam) débat de sujets de la plus haute importance pour l'humanité. Dans le Dialogue du Sauveur, le maître Gnostique, présumé être Jésus mais jamais nommé ainsi, déclare que Madeleine est celle qui révèle la vérité du révélateur. Dans l'élément du décor de King, à savoir l'Evangile de Marie, le Seigneur, qui n'est pas identifié avec Jésus, parle comme un maître Bouddhiste et dit à Madeleine: “Là où est l'esprit, là est le trésor” (Evangile de Marie, 7:4, discuté par King page 65). Mais si le Jésus présumé de la tradition Gnostique parle de cette façon, il en est de même pour Madeleine, car elle est considérée comme la femme qui connaît tout, dont les paroles et la sagesse sont égales à celles du Seigneur.

Dans la Pistis Sophia, Madeleine est dépeinte comme ayant assurément une compréhension secrète et profonde de la mission de Jésus, car elle a la connaissance qui complémente et qui accomplit son travail dans le monde. Elle incarne la sagesse (en Grec Sophia) tout autant que Jésus incarne la divinité. Elle n'est pas une disciple qui répète le message qu'elle a reçu d'une autorité supérieure. Elle n'est pas une simple disciple mais une égale, une co-créatrice. Tout cela relève de conceptions hérétiques de Jésus et de Madeleine, dérivées des écoles de l'illumination Gnostique et tellement détestées par les premiers Chrétiens qu'ils éradiquèrent toute manifestation des Mystères, qu'ils détruisirent les innombrables ouvrages de la spiritualité Païenne et qu'ils vouèrent les Gnostiques à l'exil et à l'extinction lorsqu'ils ne les assassinèrent pas publiquement, comme ils le firent pour Hypatia d'Alexandrie. L'exégèse par King de l'Evangile de Marie appartient à cet héritage de suppression.

La mystique pérenne de Marie Madeleine réside, dans une large mesure, dans son identité cosmologique mythique. Les Gnostiques l'auraient considérée comme l'incarnation de la Sophia Déchue, la figure divine au coeur de leur mythe de création. La Sophia divine était appelée la Prostituée de Sagesse. Ce motif cosmologique est certainement l'origine de l'image de prostituée attachée à Marie Madeleine. Elle n'était pas une incarnation unique de Sophia, dans le sens d'une divinité descendue dans la chair, une fois et une fois seulement, mais elle en était un reflet fidèle, en termes humains, (pour employer la terminologie de la psychologie développementale de Winnicott). Dans l'éthique du mythos qui caractérise, de façon unique, l'enseignement Gnostique, Jésus est un homme sage qui enseigne la voie de l'Anthropos et Madeleine est une femme sage qui fait de même. Leurs enseignements sont complémentaires. Dans la vision Gnostique, l'enseignement intégral et authentique doit venir des deux côtés, des deux genres. Le rôle de la Madeleine Gnostique n'est pas celui d'une autorité féminine égale à l'homme quant à l'exposition des écritures et à l'endoctrinement de dogmes moraux: son rôle est un modèle de spiritualité équilibrée.

Un article dans Newsweek (du 8 décembre 2003) avec une photo de pleine page de Karen King cite John Dominic Crossan de l'Université DePaul de Chicago: “Arrêtons de dénigrer impitoyablement Marie Madeleine en réduisant son importance à une connexion sexuelle avec Jésus. Elle n'est pas importante parce qu'elle est Mme Jésus”. Le docteur Crossan est soit incapable de comprendre le profil Gnostique de Marie Madeleine, soit il refuse d'en tenir compte. Il fait l'impasse sur le débat courant concernant la sexualité de Jésus (initié avec l'ouvrage de Baigent Holy Blood, Holy Graal en 1981 et ravivé de nos jours par l'ouvrage de Dan Brown ainsi que par le film le Da Vinci Code) comme une insulte à Marie Madeleine et il insiste sur le fait qu'elle n'est pas importante en tant que Mme Jésus. Mais même si Jésus et Madeleine étaient mariés - ce qui est hautement improbable dans la version Gnostique/Tantrique de l'histoire - le fait est qu'ils constituaient des contreparties de genres qui co-créèrent un message au sujet de, et pour, l'humanité. L'humanité idéale présentée par l'humain Jésus et élevée au rang de fantôme idéologique avec le Christ est incomplète sans sa moitié féminine. La connexion scandaleuse entre Jésus et Madeleine est sexuelle et théologique, éthique et cosmologique, exactement comme les Gnostiques la représentèrent.

Une Mise en Garde des Gnostiques

King insiste sur l'importance fondamentale du terme théologique Grec, Anthropos, mais, étrangement, elle ne fait aucune allusion à son origine Gnostique. S'exprimant sur un registre humaniste, elle traduit UIOS TOU ANTHROPOU comme “l'Enfant de l'humanité authentique” plutôt que “le Fils de l'Homme”, l'expression conventionnelle. Elle cite Marie disant au Seigneur: “Nous devrions rendre gloire à sa grandeur, car il nous a préparés et créés comme de vrais êtres Humains” (5:7-8). King ajoute: “la notion de l'Humain parfait (en Copte, PTOME NTELIOS, en Grec TELEION ANTHROPON) fait référence à l'admonestation préalable du Sauveur de découvrir l'enfant de l'Humanité authentique à l'intérieur” (page 60/61). C'est une terminologie spécifiquement gnostique émanant des Ecoles de Mystères, qui est dérobée à ses sources sans reconnaissance. Teleion Anthropon peut être traduit comme l'humanité ultime, ultra-humaine ou même l'humanité initiée. Cette expression fait référence non pas à un état spécifique d'être mais à une conscience de soi qui procède d'une perception exceptionnelle (gnosis) de l'Anthropos, l'esprit authentique de l'humanité.

La doctrine de l'Anthropos était au coeur de la vision Gnostique, ainsi que tous les érudits l'admettent. Elle fut co-optée et transformée en la notion d'humanité divine de l'hybride Jésus/Christ par les idéologues Chrétiens. La doctrine de l'homme/Dieu présente un idéal que nul humain ne peut atteindre. C'est un modèle archétypique puissant, bien que, sans doute, un modèle pathologique. La dérive pathologique est intrinsèque à l'épreuve de Jésus car, selon l'histoire, il fut injustement mis à mort et, en succombant ainsi, il devient la victime divine dont la mort rachète le monde. L'idéologie Paulienne de la victime glorifiée était spécifiquement dans la ligne de mire des Gnostiques qui mettaient en garde contre ces idées déviantes émanant d'un homme rusé et de tous ses dogmes. On trouve cette mise en garde dans l'Evangile de Philippe, cité par King (page 166) qui estime, ainsi que la plupart des érudits, qu'elle fait référence à Paul.

Le Jésus Christ de la théologie Paulienne n'est pas l'Anthropos Gnostique et Madeleine n'est pas une femme qui aurait enseigné de telles doctrines. Cependant, selon King, elle était une disciple Juive éminente de Jésus de Nazareth, ce qui nous laisse supposer que ce Jésus en question était, de façon présumée, historique et qu'il peut être, si nous le souhaitons ainsi, identifié avec le Christ de Paul. Pour le moins, King ne dit rien qui puisse présager du contraire, rien qui puisse invalider de telles présomptions. Cela étant, nous restons avec l'impression que Marie de Magdala, maintenant promue au rang de première apôtre, doit avoir exposé les doctrines Pauliniennes ou, pour le moins, répété fidèlement les enseignements de Jésus, quels qu'ils aient pu être.

Jusqu'à l'ultime page de son livre, King est profondément dans l'ambiguïté quant à la distinction entre l'idéologie religieuse attachée à Jésus, le Fils de Dieu, et le message éthique de Jésus, l'instructeur spirituel. Elle conclut son ouvrage en affirmant: “L'Evangile de Marie, ainsi que d'autres textes, affirment avec énergie que l'appropriation des enseignements de Jésus signale le chemin vers le salut et vers la vraie foi de disciple” (page 190). Apparemment, elle veut dire que Marie de Magdala représente quelqu'un qui s'est approprié le message de Jésus mais elle n'explicite pas ce que pourraient être les doctrines idéologiques attachées à l'hybride Jésus/Christ. Mais quels aspects du message de Jésus Madeleine embrasse-t-elle et comment représente-t-elle son message d'une manière typiquement féminine? L'étude de King ne projette aucune lumière sur ces problématiques alors même que l'identification de Madeleine en tant que première apôtre les soulève clairement.

La Voie au-delà de la Croyance

C'est toujours le même problème avec le Christianisme, à savoir cette fracture entre ce que Jésus a réellement dit (le message authentique) et ce qui a été dit à son sujet et au sujet de ses enseignements (le programme idéologique). Ce problème est insurmontable tant que la croyance persiste selon laquelle les idéaux de l'humanité doivent nous être dictés par un modèle d'humanité idéale, l'homme/dieu supra-humain. Mais si ce n'est pas d'idéaux impossibles dont nous avons besoin mais bien de valeurs humaines atteignables et de voies pour les réaliser et s'il n'existe pas d'humanité idéale pour enseigner cela mais seulement le potentiel de sagesse divine qui demeure en nous, notre don Gaïen à faire fructifier, alors cette croyance est erronée et elle va s'avérer extrêmement maléfique. En tant que reflet humain de Sophia, la sagesse divine, Madeleine représente une ressource qui existe chez les femmes comme chez les hommes, la force de cette connaissance précieuse (gnosis) par laquelle le potentiel humain peut être nourri. C'est son onction du Christ intérieur, si l'on peut se permettre une telle expression.

Il n'existe pas de fracture comparable dans le Gnosticisme entre le message et sa source. Les aspects cosmologiques et éthiques de la spiritualité Gnostique constituent une unité cohérente. Marie Madeleine était un reflet d'un principe déifique, l'Eon Sophia, et elle était une femme incarnée dans la chair qui enseignait la vérité humaine sans prétention à la transcendance. “Nous avons pris position sur le cosmos et nous sommes transparents au monde”. Ce sont ses mots dans le Dialogue du Sauveur. La transparence du message et la transparence du messager sont des critères typiquement Gnostiques.

Dans le sous-titre de King, Jésus et la première femme apôtre, Jésus est en première place. Selon l'article de Newsweek, Madeleine présente un modèle qui inspire les femmes d'aujourd'hui à trouver leur place dans l'église moderne, à corriger la mésinterprétation masculine de certains textes fondamentaux et de légitimer la contribution féminine à l'histoire religieuse. Mais il se pourrait que la mésinterprétation masculine des textes sacrés ne soit pas pire que la mésinterprétation féminine, plus particulièrement lorsqu'il s'agit de Madeleine. L'ennui, avec de telles exhortations, c'est que les femmes continuent d'aller à l'église, accrochées à leurs écritures, piégées dans les systèmes de croyance dominants et identifiées avec l'histoire de la culture dominatrice dans laquelle Jésus est en première place: c'est à dire domine, prévaut.

Mais si Madeleine est perçue comme étant du côté qui a perdu contre les dominateurs, l'alliance Romaine et Catholique du Christianisme historique, alors elle représente aujourd'hui, non pas un modèle de participation féminine à la succession apostolique, mais une inspiration à l'insoumission totale à la farce de collusion entre l'autorité et les écritures. Elle représente, pour les femmes comme pour les hommes, l'option de se libérer du contrôle religieux en empruntant le chemin de la connaissance spirituelle qui va au-delà de la croyance: le chemin de la Gnose.

La co-création de Jésus et de Madeleine, focalisée sur la présentation de la doctrine de l'Anthropos, était célébrée dans les écrits Gnostiques qui ont été relégués aux oubliettes par les érudits es-religions. Il en résulte la même version surannée de notre histoire. King affirme que durant les premiers siècles de l'Ere Commune, la communauté Chrétienne constituait une nouvelle humanité, à l'image de l'Humain authentique à l'intérieur (page 189). Cette prétention délirante va en rassurer beaucoup et exacerber les autres. La notion selon laquelle les premiers Chrétiens découvrirent la signification de l'humanité, inconnue de quiconque avant eux, est typique de l'arrogance de la croyance religieuse, et plus particulièrement de l'arrogance des monothéismes. La simple suggestion que les Chrétiens, alors et maintenant, représentent l'espèce humaine d'une manière qui soit unique, meilleure et plus profonde que toute autre personne, n'appartient pas à l'exégèse prudente d'un érudit. L'enseignement sur l'Humain authentique à l'intérieur n'est pas l'apanage du Christianisme ou des systèmes de croyances qui lui sont apparentés, le Judaïsme et l'Islam.

L'Anthropos, l'humanité authentique, fut présenté par les Gnostiques dans les Mystères des siècles avant l'ère Chrétienne et ce concept est clairement reflété dans les Purusha du mysticisme Asiatique qui est antérieur aux croyances Abrahamiques de plusieurs millénaires. Cet enseignement fut éradiqué, co-opté et finalement voué aux oubliettes par les représentants auto-déclarés du Christianisme. Les intellectuels Païens de l'époque de Jésus percevaient la doctrine de la valeur rédemptrice de la souffrance comme une superstition horrible. De nos jours, Madeleine est recyclée et revalorisée en tant qu'instrument fidèle de cette croyance anti-Païenne, trans-humaine et, finalement, inhumaine. (Aucun érudit n'a remarqué qu'un idéal trans-humain afférent à une croyance inhumaine peut faire sombrer l'entièreté de l'espèce humaine dans une spirale schizophrénique alors que des penseurs radicaux, tels que D. H. Lawrence et R. D. Laing, l'ont dénoncé avec une très grande lucidité. L'Apocalypse de Lawrence publiée en 1931 en révèle plus au sujet des origines Chrétiennes qu'une douzaine de professeurs King et dans la Politique de l'expérience, Laing explique comment notre capacité à vivre l'expérience peut être détruite par des double-contraintes schizophréniques comme on peut le voir dans l'idéologie Judéo-Chrétienne de la rédemption.)

La manière dont Madeleine a été dépeinte par l'imagination populaire comme triste, maussade et souffrante (pleurant comme une “Madeleine”) peut être perçue avec un autre éclairage. Ne se pourrait-il pas qu'elle soit immergée, non pas en pénitence, mais dans la douleur? En raison de tout ce que nous avons perdu. En raison de notre communion avec Gaïa détruite. En raison de la sagesse pervertie. Elle n'est peut-être pas désolée pour ce qu'elle a fait mais pour ce que nous nous faisons à nous-mêmes.

La Reconquête de la Déesse

Le Gnosticisme, pour certains aujourd'hui, n'est pas un terme obsolète mais une expérience vivante. La guerre des genres sévit au coeur du Christianisme, ainsi que nous le rappellent à juste titre les auteurs de l'article de Newsweek, alors que l'harmonie des genres vit au coeur du Gnosticisme. Dans la mesure où les religions Païennes reflétèrent les éthiques des sociétés orientées vers la Déesse, dont elles émanèrent, elles étaient tolérantes et égalitaires. Les enseignements Gnostiques constituèrent la fleur de la spiritualité Païenne. La nouvelle image supposée de l'humanité découverte par les premiers Chrétiens (selon la version dominante de l'histoire) ne toléra pas, et dans une grande mesure ne tolère pas encore aujourd'hui, d'autres conceptions quant à ce que cela signifie d'être mâle ou femelle ou, tout simplement, d'être humain.
Rivée à son écriture de l'histoire et prétendant être la seule force principale modelante et morale dans l'histoire, la religion Judéo-Chrétienne-Islamique, n'a rien engendré de positif quant aux moeurs sexuelles. Au contraire, elle a produit des siècles de honte, de répression, de misogynie et d'apartheid sexuel (ce dernier aspect est particulièrement prévalent dans l'Islam). Mais le message de la Gnose dépasse les limites de l'histoire et des conditionnements historiques des stéréotypes sexuels. Ainsi que Dolores LaChapelle l'écrit, en faisant référence à l'écologie profonde:

“Elle n'est pas limitée par le piège de toute la tradition Grecque, Chrétienne, humaniste. C'est un concept plus large fondé sur la nature essentielle des êtres humains durant, au moins, les 50 000 dernières années; non pas les distorsions que l'humanité s'est imposées à elle-même durant ces 2000 dernières années.” (Sacred Land, Sacred Sex, Rapture of the Deep. page 10).

On pourrait en dire autant du Gnosticisme qui pourrait être défini comme l'écologie profonde de l'âme humaine. Ses racines très antiques précèdent le complexe de croyances initialement formulées dans les programmes politiques du Moyen Orient à peine déguisés en religions, des programmes qui maintenant soutiennent les machinations globales du système pathologique de domination (pour emprunter ce terme à Ralph Metzner). La plaie de la société globale est, aujourd'hui, que le terrorisme ou la défense contre le terrorisme, légitimés religieusement et formulés par les mêmes catéchismes fondamentalistes, a émergé de la fusion des croyances Abrahamiques avec l'idéalisme le plus élevé de l'Ere Helléniste, transmis au fil des âges par le biais du rationalisme Platonicien et de la didactique Athénienne. Mais, comme D. H. Lawrence l'a dit il y a de nombreuses années, “l'évangile de la rédemption, au travers des Idéaux et de l'abandon du corps, a coïncidé avec la conception tragique de la vie. La rédemption et la tragédie ne font qu'une et même chose et, de nos jours, elles sont hors de propos.” (Cité par LaChapelle, ibidem).

Madeleine appartient aux racines les plus profondes et les plus antiques de notre histoire. Elle était là avant le Christ et les prophètes. La mère de Jésus n'est qu'une version de la Grande Mère, Gaïa, qui demeure en la planète. Madeleine, avant d'être la compagne du maître Gnostique, était la heirodule, la prêtresse Païenne qui consacrait les rois et les théocrates. Les études de Merlin Stone, Barbara Walker, Monica Sjoo et une grande équipe d'autres femmes érudites impliquées dans le recouvrement de la Déesse, mettent profondément en relief l'image antique de la femme mystérieuse qui conférait le pouvoir, la prostituée sacrée.

Magdala est un nom de lieu, peut-être la cité d'origine d'une version de Notre Dame , mais c'est aussi une variation d'amygdala, l'amande, et une allusion Païenne à la forme et au parfum des organes génitaux féminins. L'amygdale est une région du cervelet qui libère des nectars intoxicants dans les états mystique d'attention accrue. De produire cette connaissance chez un homme et de le guider avec, au travers d'états de conscience accrue, était le travail sacré de la prêtresse initiatrice: celle qui oint. La partenaire est la maîtresse authentique. En imprégnant le prétendant royal de révélations extatiques de la Déesse, elle le qualifiait pour la royauté. Le hieros gamos de la prêtresse et du roi modelait l'égalité sexuelle dans les théocraties Païennes. Les attributs licencieux de la prostituée sacrée étaient inhérents à ses pouvoirs de conférer la sagesse. En tant qu'agents libres requérant le respect pour leur sexualité, les prêtresses de Sophia, la Prostituée de Sagesse, se situaient au-delà de l'approbation tout comme de la réprobation. Elles modelaient l'autonomie des femmes dans les systèmes sociaux gylaniques (sexuellement et spirituellement harmonisés) qu'elles aidaient à mettre en place.

Messiah est un terme Hébreux qui signifie “l'oint”. Dans les anciens temps, les rois et les théocrates étaient oints avec des huiles précieuses afin de symboliser leur autorité. Mais qui accomplissait l'onction? Cela doit avoir été une agence supérieure parce que celle qui oint est celle qui confère le pouvoir au roi sacré, le messiah, christos, l'oint. Celle qui confère le pouvoir vient avant celui qui le reçoit.

Plutôt que de supprimer la magie de Marie de Magdala et de dénier sa dimension mythique en tant que prostituée sacrée, les exposants actuels de la Gnose célébreraient la signification de ces rituels et de ces révélations antiques. La Gnose Sophianique est un vecteur du don de sagesse à notre espèce, notre héritage divin. N'importe quelle étude qui ne prend pas en compte sérieusement les manières “libertines” de Madeleine nous spolie de cet héritage divin.

John Lash. Mars 2004

Traduction de Dominique Guillet