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Le climat mondial pourrait se rafraîchir
pour se réchauffer ensuite
Fred Pearce
Mojib Latif est réputé pour avoir contribué, de manière très conséquente, au développement des modèles de simulation du climat global et de leur utilisation pour des prédictions à court et moyen termes. Il a contribué aux rapports du GIEC de 2001 et de 2007. Sa "défection" est d'autant plus intéressante.
La prévision en changement climatique est sur le point de devenir sérieusement décalée. L'un des spécialistes en modélisation climatique mondiale a convenu jeudi que nous pourrions être sur le point d’aborder dix ou même vingt ans de températures fraîches [d’après les données cycliques, ce serait plutôt trente ans, ndt].
« Les gens vont raconter que c'est la disparition du réchauffement planétaire» a-t-il regretté devant plus de 1.500 spécialistes climatologues des trois coins du globe, réunis à la Conférence mondiale sur le climat de l'ONU à Genève.
« Je ne fais pas partie des sceptiques» a insisté Mojib Latif de l'Institut Leibniz des Sciences Marines de l'université de Kiel, en Allemagne. « Mais, nous devons nous poser les questions emmerdantes, sinon d’autres personnes le feront. »
Peu de climatologues vont aussi loin que Latif, un auteur du Groupe intergouvernemental d'experts sur le changement climatique (GIEC). Mais de plus en plus conviennent que le pronostic à court terme en changement climatique est beaucoup moins sûr qu’ils le pensaient autrefois.
Nature contre humains
Il s'agit d'un mauvais timing. L’Organisation météorologique mondiale de l’ONU a convoqué la conférence en vue d'élaborer un projet global fournissant des "services climatiques" au monde : il s’agit de fournir des prévisions météos utiles à tous les agriculteurs inquiets à propos de la prochaine saison des pluies, aux médecins qui essaient de prévoir les épidémies de paludisme et aux constructeurs de barrages, de routes et d’autres infrastructures qui nécessitent une évaluation des risques d'inondation et de sécheresse sur 30 ans.
Mais certains climatologues sont réunis à Genève pour discuter comment pourrait être admissible que, sur de telles échelles de temps, la variabilité naturelle est au moins aussi importante que le changement climatique à long terme du réchauffement planétaire. « À bien des égards, nous connaissons mieux ce qui se passera dans les années 2050 que l'année prochaine» [sic, ndt] a affirmé Vicky Pope de l’UK Met Office.
Le froid Atlantique
Latif prédit que, dans les prochaines années, la tendance naturelle au refroidissement dominera sur le réchauffement produit par les humains. Le refroidissement devrait défavoriser les variations cycliques des courants océaniques et de la température dans l'Atlantique Nord, une particularité appelée Oscillation Nord Atlantique (NAO).
Créant une hérésie dans l'orthodoxie du changement climatique, il a raconté que les cycles du NAO sont sans doute à l’origine d'une partie du vigoureux [sic, ndt] réchauffement climatique observé ces trente dernières années. « Mais, à quel degré ? Le prétoire est toujours dans l’incertitude» a-t-il reconnu à la conférence. « Le NAO s’avance maintenant vers une phase plus froide.»
M. Latif a aussi estimé que les cycles du NAO expliquent la récupération [le verdoiement, ndt] récente de la région sahélienne de l'Afrique de la sécheresse des années 70 et 80. James Murphy, chef en prévision climatologique du Met Office, est d’accord et a fait un lien entre le NAO et la mousson indienne, les ouragans atlantiques et la banquise arctique. « Les océans sont la clef de la variabilité décennale naturelle» a-t-il assuré.
Une autre panacée favorite [en faveur de l’existence du changement] climatique a été démolie quand Pope a lâché que la dramatique perte de glace arctique des étés derniers est due en partie aux cycles naturels plutôt qu’à un réchauffement climatique. Les rapports préliminaires indiquent qu'il y a bien moins de fonte [glaciaire] cette année qu'en 2007 ou 2008.
Avec leur humeur franche, les climatologue ont pourtant [généreusement] évité de rendre la nature responsable de leurs prédictions boiteuses. « La supposition en modélisation est aussi toujours un grave problème. Nous avons un long chemin à faire avant de la rendre exacte. Ça fait du tort à nos prévisions» a gémi Tim Stockdale du Centre européen de la prévision climatique à moyenne portée à Reading en UK.
Il se pourrait que le monde aspire fichtrement à des prévisions sérieuses pour le climat futur. Mais ce genre de prédictions se révèle aussi évasif que la prophétie parfaite en météo.
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