RechercAccueil - Contact
Chercher sur Liberterre
GaiaSophia Agriculture
Métahistoire Enthéogènes

Métahistoire

Pas en Son Image

•> 09. Ecoles de Co-Evolution

•> 10. La Déesse déchue

•> 11. Physique du Temps de Rêve

•> 13. La passion de Sophia

•> 21. Dévoilement du Mal

•> 23. La Connexion Espèces-Soi

•> 24. La mystique de la Déesse

•> 25. L'Ecologie Sacrée

ActualiTerres ReporTerres
LiberTerres Gaïagnostic
LivreTerres Boutique

La mystique de la Déesse

John Lash

Voir Page 1

Une finalité trans-humaine

Deux autres éléments notoires du mythe de Sophia sont intimement corrélés à des aspects encore indéterminés de l’hypothèse de Gaïa, à savoir la panspermie et la singularité. L’émergence de l’Anthropos est une manière mythologique de décrire la panspermie, la dissémination de la vie à travers l’espace interstellaire. Lynn Margulis affirme que des particules minuscules et protégées de vie organique appelées “propagules” pourraient se disperser au travers de l’espace, et des preuves matérielles confirment cette affirmation. Dans l’ouvrage “What is Life?”, Margulis évoque le fait que des spores bactériens propulsés par des vents solaires d’étoile en étoile pourraient expliquer l’origine de la vie sur terre “mais une telle conception est moins vérifiable par l’investigation scientifique que la conception de l’origine de la vie ici même sur la Terre”. Même si la vie était originaire de l’espace lointain, “la Terre, elle-même, est suspendue dans l’espace et donc, de toutes façons, la vie est venue de l’espace”.

Je doute fort que le Professeur Margulis puisse être réceptive à la notion selon laquelle la vie sur terre a évolué à partir d’une émanation du coeur galactique, comme les Gnostiques le proclament. Ou que l’humanité, une souche de l’Anthropos, soit une “singularité” au sein du spectre de la vie organique dans la biosphère. Ce sont des notions religieuses et mystiques dont la réconciliation avec la science est peu probable. Et pourquoi devrait-il en être autrement? Le propos de ces corrélations n’est pas de convertir la science, et certainement pas de la pervertir, mais d’aligner la méthode scientifique avec la pratique mystique authentique. Depuis la publication du “Tao de la Physique”, en 1975, par Fritjof Capra, nous avons l’habitude d’accepter les parallèles entre le mysticisme et la physique, mais les lignes parallèles ne se rencontrent jamais. Dans “La Toile de la Vie”, publié 20 ans plus tard, Fritjof Capra affirma carrément que “la physique a maintenant perdu son rôle de science présentant la description la plus fondamentale de la réalité”. Il cite l’écologie profonde comme étant la matrice de la nouvelle pensée dans les sciences naturelles. Seul un physicien qui est aussi un mystique, ou vice-versa, peut se prononcer sur la valeur de l’expérience mystique pour la science. A la connaissance de l’auteur, un tel hybride rare n’est pas encore apparu sur la planète.

Le second élément notoire, la singularité, est corrélé de près à la panspermie dans les écrits Gnostiques, bien sûr. Le concept Grec monogenes est théologiquement rendu comme “engendré seul” mais le terme “singularité” est beaucoup plus fidèle à l’esprit des initiés Gnostiques. Chaque année qui passe voit le concept d’autopoesis se renforcer dans l’hypothèse Gaïa; cependant, le thème de la singularité dans l’écosystème est encore largement indéfini. Les lecteurs auront noté que je n’utilise pas le terme “singularité” dans son sens conventionnel - à savoir, un point de volume et de densité infinis atteint par la matière qui s’effondre dans un trou noir, tel que l’a proposé Roger Penrose, en utilisant les équations d’Einstein - mais comme une métaphore pour indiquer la signature cosmographique de l’espèce humaine. La singularité implique la capacité d’une contribution humaine unique à l’écosystème.

Si les Gnostiques avaient raison d’affirmer que nous, l’espèce humaine, constituons la singularité prévalente dans le Rêve de Sophia, il nous faut alors considérer comment ce statut nous place dans l’écosystème. En fait, cette problématique a été, depuis le début, l’épine dans le pied de l’hypothèse Gaïa. Tout au début, Lovelock considérait l’humanité comme bénéficiant peut-être du statut privilégié de circuit conscient de soi dans le système nerveux de la planète. Au fil des années, il modifia cette vision assez généreuse. Dans son avant-dernier ouvrage, “Gaïa : Une médecine pour la planète”, il se demande si nous ne serions pas plutôt un furoncle sur le visage de la planète, ou une forme de pollution. Lynn Margulis est également sans pitié sur cette question. Elle cite la remarque acerbe de Nietzsche “La Terre est un endroit magnifique mais elle souffre d’une vérole qu’on appelle l’homme”. Les deux créateurs de l’hypothèse Gaïa sont fortement opposés aux formulations de la mystique de la Déesse de type Nouvel Age qui placent l’espèce humaine à l’apex de la spirale ascendante de l’évolution ( voir, par exemple, le modèle de “spirale évolutive” proposé par Barbara Marx Hubbard dans son ouvrage “The Evolutionnary Journey”). Cet écrivain s’accorde avec Lovelock et Margulis pour rejeter l’anthropocentrisme grandiose de telles conceptions. Je crois que nous arriverons à percevoir notre signification profonde le jour où nous deviendrons humbles au point de ne plus avoir de prétentions quant à notre contribution aux processus de vie de Gaïa. Si nous amenons réellement quelque chose d’unique et d’exceptionnel - et c’est, bien sûr, ce que les Gnostiques affirmaient - nous pourrons le découvrir quand nous prendrons conscience des processus vitaux et trans-humains à long terme de Gaïa. Et en particulier, l’extinction.

Pour décrire l’écosystème auto-organisé dans lequel nous demeurons, Lovelock utilise le terme de “système émergent”. C’est un “système qui a émergé de l’évolution réciproque des organismes et de leur environnement au fil des éons de la vie de la Terre.” L’émergence est le nouveau concept à la mode dans les sciences de la biologie, comme nous l’avons déjà mentionné. Plus ce concept se développe, plus il ressemble à la théorie de l’émanation commune aux métaphysiques Asiatiques et aux Mystères. Avec le concept d’émergence, la science s’engage résolument dans les physiques du Rêve Temps de la sagesse indigène (voir chapitre 11). Il se peut que la clé de notre singularité en tant qu’espèce ne puisse être appréhendée qu’en termes d’une “évolution réciproque”, plutôt que de l’évolution téléologique vers laquelle l’hypothèse Gaïa tend à se diriger. Actuellement, “l’hypothèse Gaïa renforcée” implique une orientation téléologique, à savoir avec une finalité, pour l’écosystème qui inclue l’espèce humaine. Bien que ce concept soit prématuré, il est indispensable en tant qu’approche de la problématique de la singularité. D’un point de vue Gnostique, nous n’avons pas encore assez de connaissances quant à la “correction” de Gaïa pour en percevoir notre niveau de participation. Il nous faut, ainsi, être extrêmement prudent quant à la finalité assumée par l’humanité dans l’écosystème. Cependant, le concept d’identité émergente actuellement à l’étude par Lynn Margulis, et d’autres chercheurs, présente une tentative de compréhension de la manière dont l’humanité pourrait interagir dynamiquement avec la totalité de la biosphère d’où elle a émergé. Il pourvoit également une façon d’imaginer comment la vie terrestre aurait pu émerger du centre galactique et s’y relier en se ressourçant consciemment à la matrice cosmique de la vie.

Ces considérations soulèvent la question des finalités trans-humaines de Gaïa: ce que la planète réalise dans son expérience d’autonomie à long-terme, indépendamment de notre participation, ou même des effets de notre présence. Cette question essentielle nous ramène aux trois dernières caractéristiques marquantes de la vision Sophianique qui, ainsi que je l’ai suggéré, se situent au-delà des limites présentes de la théorie mais qui pourraient la faire évoluer et l’enrichir si elles étaient formulées en termes scientifiques. Ces aspects concernent le mode de reproduction de Gaïa, la façon dont elle compte sur le mental humain (noös) et la façon dont elle peut être dynamisée par l’imagination humaine (epinoia). Le mythos ne dit rien sur le mode de reproduction de Gaïa mais il est très prolifique à propos des concepts de noös et d’epinoia. Ce n’est qu’en développant ces facultés en nous-mêmes que nous pourrons atteindre une connaissance expérimentale vérifiable des biophysiques Gaïennes, y compris l’extinction.

Selon James Leakey (“La 6 ème extinction, Évolution et Catastrophes”) et d’autres, nous sommes présentement dans une phase d’extinction - non pas en risque d’extinction - mais en plein processus d’extinction. C’est le moment de nous engager, avec tous nos sens, dans une relation d'osmose profonde avec la planète afin de comprendre quelles sont les finalités trans-humaines de Gaïa. Ce n’est que dans la perspective trans-humaine que nous pourrons appréhender la finalité que l’humanité pourrait assumer en termes Gaïens.

Notre futur en tant qu’espèce réside dans ce paradoxe.

Voir Page 3