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Chapitre 25
L'Ecologie Sacrée
John Lash
Traduction de Dominique Guillet.
Pour qu'un espoir réel de recouvrer et de faire revivre la Gnose puisse exister de nos jours, il nous faut examiner attentivement les problèmes inhérents à l'Age des Poissons, que les Telestai n'étaient pas capables de résoudre ou qu'ils n'eurent pas l'opportunité de résoudre. L'écologie profonde peut assurément puiser la dimension mythique et spirituelle, dont elle est dépourvue, dans la vision Sophianique des Mystères - c'est du moins les prémisses de cet ouvrage. Je ne peux pas prévoir comment cela va se passer, ou même si cela va se passer, mais je peux offrir une esquisse des conditions requises pour sa réalisation.
La Gnose n'est pas une religion mais on pourrait très bien, cependant, la caractériser comme une trinité sacrée: Gaïa, les autres espèces et l'Anthropos. Chaque aspect de cette trinité soulève la question fondamentale de notre vision de la vie, en tant qu'êtres humains. En d'autres mots, la trinité implique trois perspectives: notre vision de Gaïa, la planète vivante; notre vision de toutes les espèces, à l'exception de nous-mêmes, et incluant toutes les entités microbiennes et moléculaires; et la vision de notre espèce propre. Il nous faut arriver à une formulation claire de ces trois perspectives afin de prendre en compte les problématiques que les Telestai n'ont pas pu résoudre. Je propose d'examiner ce processus, non pas comme une corvée peu enthousiasmante d'aborder des problèmes ésotériques et exaspérants mais comme une aventure dans laquelle nous sommes invités à nous engager afin de recouvrer la vision Sophianique.
Une Planète Consciente
Considérons, tout d'abord, notre vision de Gaïa, la planète vivante. C'est, disons, l'apex de la trinité de l'écologie sacrée. A la suite de nombreuses années de réflexion, James Lovelock décrit avec précaution la théorie qu'il a introduite dans le monde: “Je ne conçois pas, à la façon animiste, une planète douée de conscience”, dit-il dans Gaïa : Une médecine pour la planète. Peut-être ne le conçoit-il pas lui-même, mais beaucoup d'autres le conçoivent fort bien. Le coeur du problème, dans notre vision de Gaïa, est de porter notre regard au-delà de ce que la science matérialiste suppose sans nous égarer dans des délires mystiques. C'est précisément là que la mystique de la Déesse faillit. Elle fait entrer en jeu un ensemble de croyances animistes nébuleuses concernant la planète. James Lovelock, tout comme Lynn Margulis, récusent l'animisme inhérent à la mystique, et ce pour de bonnes raisons. La vision Sophianique est tout autant obscurcie par le mysticisme de pacotille du Nouvel Age que par le vernis gentillet et sentimental du Néopaganisme. Les croyances animistes ne répondront pas aux défis qui n'ont pas été relevés par les initiés des Mystères antiques, mais la théorie de Gaïa deviendra animiste, d'une façon ou d'une autre. La question est juste de savoir comment.
L'hypothèse Gaïa et l'écologie profonde apparurent dans le monde presque simultanément. Il semblerait que ces deux propositions soient intimement corrélées mais, à ce jour, elles n'ont pas fusionné et n'ont pas, non plus, été associées dans le discours populaire ou dans le discours des experts. Une des raisons pour cela est peut-être que les hypothèses spécieuses associées à la théorie Gaïa, principalement par les adeptes du Nouvel Age qui promeuvent le concept d'une planète consciente, font passer au second plan les aspects mêmes de la théorie qui pourraient être compatibles avec les principes de l'écologie profonde. Les hypothèses spécieuses concernent les questions suivantes: Gaïa est-elle bienveillante? (récusée par Lynn Margulis); Gaïa est-elle capable de contrôler la planète de façon intentionnelle et consciente? (récusée par Lynn Margulis et James Lovelock); l'humanité possède-t-elle un rôle spécial à jouer dans les biophysiques Gaïennes? (débattue de façons diverses par Lynn Margulis, James Lovelock et d'autres). Cependant, s'il faut en croire les défenseurs de la mystique de la Déesse, qui s'est développée à partir de la théorie Gaïa, la réponse à toutes les questions ci-dessus est un oui catégorique. Cette affirmation inspire et encourage de nombreuses personnes qui se sentent profondément concernées par le destin de la planète - mais tout cela est-il vrai? Ne serait-ce pas prendre ses rêves pour la réalité à l'échelle planétaire? Un syndrome d'illusion cosmique?
Dans la révélation par l'initiation des Mystères, les participants réussissaient à connaître Gaïa grâce à un contact direct avec la Lumière Organique. Mais c'était du mysticisme et non pas de la science, n'est-ce pas? Lynn Margulis définit la science comme “une façon d'intensifier l'expérience sensorielle que l'on a des autres organismes vivants et de l'environnement, de manière générale”. Avec un regard courroucé en direction des admirateurs de la Déesse, elle met en garde contre le “biomysticisme débilitant” et la “déification de la terre par les doux-dingues de la nature”. Et bien, un gnostique dirait que sa définition de la science est une définition relativement correcte du biomysticisme. L'intensification de l'expérience sensorielle, au travers d'une relation approfondie avec la nature, n'est pas le moins du monde débilitante. Au contraire, la pratique du biomysticisme encourage la renaissance des anciens Mystères: une régénération qui s'opère grâce à un abandon extatique à la force de vie.
Dans cet ouvrage, j'ai prôné l'animisme et j'ai affirmé que Gaïa est consciente, mais ce ne sont pas des assertions que l'on doit accepter sur la foi ou rejeter en raison de leur caractère non scientifique. Ce sont plutôt des propositions qu'il faut valider. De toutes façons, comment pourrions-nous vérifier la conscience de Gaïa? Comment pourrions-nous le prouver scientifiquement? Comment pouvons nous savoir que la planète peut ressentir et réagir à l'instar d'un animal? Posons la question d'une autre manière: comment Gaïa pourrait-elle nous communiquer sa conscience? Le premier aspect de la trinité - notre perception de la planète vivante - soulève le problème gigantesque de la communication. L'anthropologue Jeremy Narby résuma ce problème avec élégance: “Comment la Nature pourrait-elle ne pas être consciente alors que notre propre conscience est un produit de la nature?” Raisonnant de façon logique, Narby part du principe que la conscience que nous avons ne peut pas avoir procédé de quelque chose de moins conscient. Mais la conscience humaine est de plus intimement liée au langage. Si la nature (Gaïa) est réellement consciente, comment peut-elle nous le laisser savoir sans avoir recours à une forme de langage?
Voilà le noeud du problème. Notre vision de Gaïa ne pourra que s'enliser dans des spéculations stériles tant que nous ne pourrons concevoir qu'elle puisse communiquer avec nous au moyen du langage tel que nous le connaissons. Tant que cela ne sera pas possible, nous ne serons pas capables d'affirmer qu'elle est consciente tout comme les animaux le sont et tout comme nous le sommes nous-mêmes. Positionnant la question de Narby dans une autre perspective: comment imaginer que la nature, qui a généré une espèce douée de langage, ne puisse pas être capable d'utiliser le langage de cette espèce afin de communiquer avec elle? Les shamans Péruviens, qui initièrent Narby lors de rituels de visions avec l'ayahuasca, un breuvage psycho-actif, témoignèrent d'une telle communication. Ils affirmèrent que les plantes sacrées leur parlaient, leur enseignaient de nombreuses choses, dont l'utilisation correcte des plantes. Cela veut dire que la nature leur parle dans le langage qu'elle leur a permis de développer en tant qu'espèce. N'est ce pas parfaitement logique?
Mais on pourrait, bien sûr, objecter que Gaïa, la Nature Mère, n'a pas de larynx, de bouche et de langue. Elle est dépourvue des organes physiques de la parole. Il est vrai, mais, nous-mêmes, nous exprimons nous aussi sans avoir recours à ces organes. Le penser est un langage subvocal que nous entendons comme s'il était audible. Nous n'avons pas besoin de langue pour communiquer mentalement. Il est certain que la plupart de nos communications mentales consistent à nous parler à nous mêmes “dans nos têtes” - ce qu'on appelle le monologue intérieur. Si nous ne pouvons pas encore communiquer télépathiquement, de l'un à l'autre, c'est uniquement parce que nous sommes dépourvus de la capacité de délibérément recevoir et transmettre le langage subvocal de notre pensée. Et si Gaïa, qui nous a dotés de nos facultés de communication, pouvait déjà faire preuve de capacités télépathiques que nous serions seulement en mesure de développer dans le futur? Cela étant, elle pourrait nous parler au travers de n'importe quel langage sur terre sans avoir besoin d'une bouche et d'une langue. Selon le témoignage des peuples indigènes, qui ont recours à des plantes psycho-actives pour accéder à la conscience de Gaïa, c'est exactement ce qu'elle fait.
Un Mystique de la Nature
“Je pense que la plus grande partie de ce qui a été dit sur Dieu l'a été, en réalité, sur cet esprit dont le corps est la Terre”.
Les Gnostiques enseignèrent que la conscience de la terre est une expression du Rêve de Sophia. Nous émanons de la plénitude cosmique, du coeur du Plérome, par l'entremise du rêve de Sophia. Le futur le plus idéal pour l'humanité est de faire un don à Sophia, dans la réciprocité, en la rêvant.
La force de vie de la planète est animée et animante et elle confère une expression aux créatures qui sentent qu'elles sont vivantes. L'animisme se définit comme la perception que le monde est vivant et non pas comme la simple croyance que le monde soit vivant. La théorie de Gaïa, dans son exposé scientifique, soulève la question de l'animisme mais ne peut pas y répondre. Le renouveau de l'animisme n'implique pas une simple hypothèse de la conscience de la nature mais son expérience directe. Cette expérience serait naturelle et spontanée, parce que c'est une de nos facultés écognostiques, si nos croyances débilitantes disparaissaient, dont la croyance en l'identité de l'ego. L'écrivain de science-fiction Philip K. Dick a dit que la Gnose est un ensemble “d'instructions de désinhibition” qui nous ouvrent les portes d'un monde immense de connaissances innées et intuitives. Ce que je propose d'appeler “connaissance silencieuse” est un état d'attention extasiée à la présence de la terre. C'est le mutisme éloquent de l'admiration béate. Le témoignage des personnes, qui ont fait l'expérience d'une vague spontanée de connaissance silencieuse, peut beaucoup nous apprendre quant à la communication avec Gaïa. Un tel témoignage provient de l'écrivain, peintre et mystique Irlandais connu sous le nom de AE.
George William Russell (1867-1935), qui écrivit sous le nom d'auteur AE, affirma que “l'immortel en nous possède la mémoire de toute sa sagesse”. Dans une analyse simple, mais cependant de très grande portée, de sa propre expérience mystique, Russell associa la mémoire immortelle porteuse de sagesse avec la faculté d'imagination. “Cette mémoire de l'esprit est le fondement réel de l'imagination et lorsqu'elle nous parle, nous nous sentons réellement inspirés et une créature plus puissante que nous-mêmes s'exprime à travers nous.” L'accentuation d'à travers oriente vers ce que j'ai appelé la trans-conscience. La théorie de Lynn Margulis sur l'endosymbiose porte sur les créatures qui vivent au travers les unes des autres. La perception animiste confirme que la faculté de vivre au travers est une caractéristique fondamentale de l'écosystème.
Le mémoire éloquent de Russell, The Candle of Vision, est un des grands classiques de la spiritualité Occidentale. Personne d'autre n'a décrit la vision tellurique de cette façon, avec une telle candeur, simplicité et richesse. Russell devint convaincu, lorsqu'adolescent il marchait parmi les champs d'Armagh au nord de l'Irlande, “qu'un mythe s'incarna en moi, l'histoire d'un Aeon, une des premières émanations cosmiques de la Divinité, un être éminent dans les cieux les plus élevés”. Dans une bibliothèque de Dublin, il trouva un dictionnaire des religions avec un paragraphe sur les Gnostiques et ses yeux tombèrent sur le mot Aeon, le terme Gnostique pour un dieu ou une divinité. De cette référence fortuite, il emprunta sa signature AE. L'émanation cosmique de la Divinité, qu'il perçut intuitivement grâce uniquement à la richesse de sa vie intérieure, était la déesse de la sagesse, Sophia.
Russell était un écrivain, un peintre, un visionnaire social influent dans la vie politique Irlandaise. Il fut l'éminence grise derrière le Renouveau Celtique, un mouvement culturel et spirituel Irlandais qui contribua au renouveau occulte Européen et qui dura approximativement de 1885 à 1915. Il fut un ami proche du prix Nobel William Butler Yeats et de Lady Gregory, qui dirigea le Renouveau Celtique. Yeats et AE étaient tous deux membres du Mouvement Théosophique fondé par Madame Blavatsky et Henri Steele Olcott en 1875. La Théosophie exerça une influence profonde sur de nombreux artistes et intellectuels de l'époque - par exemple, Vassily Kandinsky qui rédigea un ouvrage important présentant une théorie de l'art inspirée de concepts théosophiques, Concerning the Spiritual in Art. AE, qui inventa le terme “surnature”, était un mystique naturel qui n'avait nul besoin de théorie pour le guider dans une extase cognitive. Dans un état de transe spontanée, il fit l'expérience d'une séquence de visions très vivantes de l'Europe pré-Chrétienne et peut-être d'Atlantide. Sa compréhension de ces expériences fut facilitée par ses lectures concernant les Gnostiques et les Sabéens, un groupe d'astronomes qui vivaient dans l'ancien Iran. AE déclara que ses visions étaient dues à sa faculté de “contact vital” avec son environnement naturel.
Dans l'ouvrage The Candle of Vision, AE identifia le dieu Celtique de la rivière Manannan avec le courant visionnaire de “l'imagination divine”, la force sublime qui l'emplissait durant ses transes. (La racine man- se retrouve très amplement dans la mythologie mondiale, toujours en connotation avec un guide humain mais surnaturel: par exemple, le Manu Hindou et le Manitou Amérindien, qui sont des expressions du Mesotes). Tout comme cet autre mystique naturel, le poète Romantique William Blake, AE identifia le pouvoir de l'imagination avec le Christ, qu'il appela “le magicien de la Beauté”. Décrivant le charme sensuel des nymphes et des dryades qu'il rencontrait dans ses visions, AE déclara qu'elles avaient “une beauté qui n'avait jamais, semble-t-il, été entachée par l'acte individualisé de volonté qui confère aux êtres humains la possibilité de choix entre le bien et le mal et la possibilité de souiller le réceptacle de la beauté naturelle.” AE était un mystique exceptionnel de par le fait que ses facultés clairvoyantes ne s'exprimaient pas par un processus médiumnique inconscient tel qu'il se manifestait, par exemple, chez le “prophète dormant” Edgar Cayce et chez Jayne Roberts, le médium célèbre qui transmis les enseignements de Seth. Son observation, selon laquelle le dualisme strict du bien et du mal enferme la connaissance humaine dans un système de pensée qui ne peut pas accepter la beauté et qui ne peut pas se laisser porter par le flux de la révélation perpétuelle de la nature, est une prise de conscience authentiquement Gnostique et dessert une profonde réflexion.
Les visions de Russell étaient totalement somatiques, enracinées dans le corps physique et tout ce qu'il percevait était tout aussi vivant que lui-même. “Cet Infini en lequel nous pénétrons est vivant”. Au fil des visions, il ressentait “une luminescence croissante dans mon cerveau comme si j'avais libéré dans mon corps une fontaine de lumière intérieure”. L'évocation d'une fontaine de lumière existe dans plusieurs discours de révélation des Codex de Nag Hammadi, ainsi que nous l'avons vu. La chandelle d'AE est une humble métaphore pour la luminescence douce de la Lumière Organique. C'est pour nous tous que la chandelle brûle. “Dans chaque esprit existe la Lumière Surnaturelle du Mystère ineffable”. (Second Traité du Grand Seth, 67.10).
Russell cite le mystique Proclus sur le Mental Divin: “Il n'est pas encore parti mais demeure dans la Profondeur Eternelle et dans le sanctuaire intérieur du Silence nourri de dieu”. Ce fragment d'enseignement des Mystères pourrait avoir été extrait des codex Egyptiens. Proclus, qui naquit l'année de la mort d'Hypatia, étudia au Musée d'Alexandrie et fut certainement initié dans les enseignements Gnostiques. Sige, Silence, est un Aeon dans le Plérome, la compagnie de dieux à partir de laquelle Sophia plonge dans son Rêve d'un monde émergent. Le passage que cite AE explique comment les Aeons restent éternellement placides, absorbés dans le Non-Créé, même lorsque leur ennoia (intention) produit des mondes en dehors du Plérome. Ce processus détaché de manifestation est typique de l'émanation, à savoir le processus cosmologique enseigné dans les Mystères.
AE n'aurait pu avoir aucun accès aux enseignements originels des Gnostiques, virtuellement inconnus à son époque, et il ne semble pas qu'il ait connu G. R. S. Mead, l'érudit Gnostique en titre de la Société Théosophique. The Candle of Vision ne contient aucune allusion à l'Aeon Sophia ou à une quelconque “déesse de la terre”, à l'exception d'un hommage à Dana, la déesse mère Celtique. Cependant, tout ce qu'AE dit de la mémoire de la Nature peut s'appliquer à la Sophia des enseignements Gnostiques. Ses expériences visionnaires étaient des rêveries Sophianiques inspirées de son contact vital avec la terre. Ce sont ainsi des exemples vivants d'une perception animiste de la Déesse à laquelle aspirent certaines personnes de nos jours.
AE dit de ses visions que leur créateur transcende le soi éveillé et même le soi qui rêve durant la nuit et cependant cette puissance, “un de nos sois les plus puissants” fait de lui-même “notre esclave pour des finalités qui lui sont propres”. Ce langage se rapproche beaucoup de l'intuition Gnostique selon laquelle la Sophia déchue s'en remet, dans une certaine mesure, à la collaboration humaine afin d'accomplir sa correction. Le sublime petit ouvrage de Russell ne répond pas à toutes les questions qui sont soulevées sur le chemin de la connaissance de Gaïa mais il en émane une atmosphère propice à la contemplation de ces questions. Son évocation de Sige, “Silence nourri de dieu” est particulièrement bienvenue. Le soi conscient ne peut pas atteindre à la connaissance silencieuse mais cette connaissance silencieuse peut s'y introduire lorsque cesse le dialogue intérieur, permettant ainsi d'entendre d'autres choses. Tout un chacun peut jouir de ces moments lorsque le monde s'arrête et lorsque qu'un calme indéfinissable nous envahit. De pénétrer et de demeurer dans de tels moments fait partie intégrante de la discipline mystique qui fonde la vision Sophianique.
La Grande Bête
Dans le Chapitre 17, nous avons vu comment les membres de la cellule des Mystères d'Antioche tentèrent d'introduire la figure pastorale d'Hermès afin de représenter l'Anthropos pour les masses de l'Age des Poissons. Cet épisode concerne les deux autres points de l'écologie sacrée, la base de la trinité: notre vision de la nature non-humaine et notre vision de nous-mêmes.
Le berger Hermès ne constituait pas une solution entièrement satisfaisante pour les besoins de l'époque. L'humanité n'est pas seulement mâle. Il se peut que les initiés aient choisi Hermès moins pour la manière dont il illustrait l'Anthropos que pour la manière dont il convoyait une image visuelle du Mesotes, le guide intérieur. Puisque le Mesotes prend le plus souvent la forme du Jésus vivant, une forme mâle, ils pouvaient se permettre la masculinité d'Hermès, mais en fait, tout juste. Il leur restait, en effet, à remédier à la discrimination de genre liée à cette représentation. Gardez à l'esprit que l'Anthropos n'est ni mâle ni femelle et n'est pas non plus androgyne! Le Mesotes est l'empreinte bioplasmique rémanente de l'Aeon Christos. En tant que tel, il ne représente pas l'humanité originelle, l'Anthropos. Nous avons tellement l'habitude de penser au Christ comme le représentant suprême de l'humanité qu'il est difficile de faire autrement alors qu'en fait aucun être humain ne peut personnifier l'Anthropos. Pour les initiés Gnostiques, le Mesotes, qui assumait une apparence humaine et mâle, était clairement distinct de l'Anthropos, l'archétype cosmique numineux de l'espèce humaine.
Totalement conscients que l'esprit de l'époque des premiers Chrétiens était complètement opposé aux images conviviales et sensuelles de la divinité féminine, les Gnostiques d'Antioche ne pouvaient avoir recours à l'imagerie de la déesse. Ils considérèrent diverses options theriomorphiques communément déployées dans le panthéon Egyptien des dieux et des déesses. Cela paraissait leur meilleure option parce que l'intercession du Christos avait renforcé la relation empathique entre l'humanité et les autres espèces animales. Pour rester fidèle aux intuitions les plus profondes au coeur de la psyché humaine, le Mesotes aurait du être identifié avec une forme animale. Comme compromis, la communauté d'Antioche choisit l'image traditionnelle d'Hermès Kriophoros, l'homme avec un agneau reposant sur ses épaules.
Des traces subliminales de l'intercession du Christos persistèrent dans la mémoire populaire des peuples Européens durant de nombreux siècles. Les légendes Chrétiennes n'étaient souvent rien de plus que des imitations à peine déguisées des visions pérennes issues de la psyché indigène. La conversion de Saint Eustache fut inspirée, par exemple, par une vision du Christ entre les bois d'un cerf. L'imagination indigène ressent toujours le Mesotes en relation intime avec le royaume animal non-humain. L'Empereur Constantin bâtit une chapelle sur le site où la vision se manifesta, un exemple typique de cooptation de la vision indigène par l'idéologie dominante. Dans La Légende du Graal, Emma Jung et Marie-Louise von Franz montrent l'immense profondeur et complexité de l'identification du Christ avec un cerf. Dans l'art allégorique de la fin du Moyen-Age, le Christos était représenté par une licorne. L'assimilation de telles images au Christianisme doctrinal fut une pratique tellement répandue qu'il devint impossible pour quiconque, à l'exception de mystiques confirmés, de savoir que le Christ, le Rédempteur Divin de l'idéologie du salut, n'avait rien à voir avec les esprits animaux numineux de la connaissance visionnaire indigène.
Dans les cultures indigènes des Amériques, le Mesotes était perçu, généralement durant une quête visionnaire, comme un animal magique ou un “animal de pouvoir”. Il se manifestait également dans des personnages humanoïdes tels que le Manitou des Algonquins, pour ne citer qu'un nom parmi les douzaines de noms attribués au Mesotes par les Amérindiens. Le Grand Esprit qui vivait dans la nature, et qui enseignait la parenté de toutes les espèces, arpenta les étendues sauvages des Amériques bien avant que le Rédempteur Divin n'arrive des rivages Européens. Infectés depuis des siècles par le virus du Sauveur, les envahisseurs Européens ne possédaient plus du tout la faculté psychique de se mettre au diapason du Mesotes. L'esprit du sauvage était pour eux muet et hostile. La conquête sous le signe de la Croix exigeait de marquer au fer rouge de l'empreinte humaine tout être vivant, et ce à l'opposé de la communion et de la réciprocité avec tout ce qui vit.
Vers le milieu du Moyen-Age, certains idéologues Chrétiens firent passer Pan, le dieu suprême de la nature dans le Paganisme, pour le Diable. Bien avant que cela n'arrivât, les Gnostiques du Levant furent témoins de la vague montante de phobie pour le monde animal et le monde naturel, un symptôme du complexe du rédempteur. Cette phobie était tellement intense au sein du bercail Chrétien qu'elle provoqua des éruptions pathologiques d'amplitude sismique. St Jean le Divin, ainsi que l'apôtre Paul, furent les principaux vecteurs de la fièvre apocalyptique des Zaddikim dans l'idéologie Chrétienne. L'Apocalypse se rapproche très étroitement de textes de Qumran tels que le Manuscrit de la Guerre et l'Apocalypse Messianique, avec en plus des embellissements terrifiants. A la génophobie des Zaddikim, Saint Jean le Divin ajouta une forte dose de theriophobie, à savoir de haine de l'animal. Le doux agneau d'Hermès devient le symbole sacrificiel suprême, l'Agneau de Dieu, “immolé dès la fondation du monde”, sa toison maculée de sang (Apocalypse, 13:8). Associée très étroitement à l'Agneau est la mega therion, la Grande Bête:
“La bête que je vis ressemblait à un léopard; ses pieds étaient comme ceux d’un ours, et sa gueule comme une gueule de lion. Le dragon lui donna sa puissance, son trône et une grande autorité. Une de ses têtes paraissait blessée à mort; mais sa plaie mortelle fût guérie, et toute la terre, saisie d’admiration, suivit la bête.” (Apocalypse, 13:2-3).
Dans un état de terreur pathologique, Jean a la vision des animaux de pouvoir en un mélange bizarre. Il ressent la force de guérison merveilleuse du monde animal mais il la voit comme une horreur qui doit être exterminée. La réponse des cieux à la Grande Bête est une attaque d'anges destructeurs qui déversent sur la terre des coupes de colère. Telle est la vision d'Armageddon dans Apocalypse 14. Jean imagina que les Plaies et la pollution mettront fin au monde. Les gens qui adoptèrent sa vision en vinrent à dominer le monde et il est donc très possible que l'histoire se déroule de la façon dont leur script directeur l'exige. Il est plus que probable que cela se passera si on laisse ceux qui suivent ce scénario mettre en oeuvre le drame apocalyptique sans leur faire opposition et sans leur résister.
Les initiés des Mystères mettaient en oeuvre un autre scénario qui n'autorisait ni ne glorifiait la violence, à l'opposé du récit de la rédemption Judéo-Chrétienne - et à l'opposé, depuis le 7 ème siècle, du récit de l'Islam, une mutation hautement toxique et biocidaire du même complexe. Le Christianisme se targuait d'avoir renoncé au sacrifice animal alors que, cependant, l'anthropocentrisme Chrétien présuppose que l'entièreté du monde animal n'est pas indispensable parce qu'il n'est pas impliqué dans le plan de la rédemption. La thériophobie du Christianisme primitif choqua profondément les initiés Païens. Les Gnostiques de la cellule d'Antioche prirent conscience du risque à utiliser des images thériomorphiques afin de dynamiser l'imagination collective. Pour invoquer le personnage du Mesotes, ils choisirent l'animal le plus doux et le plus inoffensif, l'agneau nouveau-né.
L'écologie sacrée devra intégrer, dans le futur, les animaux de pouvoir et les gardiens totémiques afin d'être cohérente avec la vision Sophianique de la parenté de toutes les espèces. La protection des espèces en voie de disparition joue un rôle particulièrement crucial dans le renouveau Gnostique. Prenons l'exemple des lions blancs de Timbavati. Dans Mystery of the White Lions, Linda Tucker offre un message magnifique et étonnant sur la communication entre les espèces. A la fin de son ouvrage, elle compare les lions blancs au Christ, et elle est à deux doigts de valider la théologie de la rédemption, du sacrifice et de la relation victime-perpétrateur. (Tucker fut formée dans la psychologie Jungienne, un système qui promeut l'association d'images symboliques au mépris de leur valeur vécue et existentielle). Elle présente un magnifique dessin de “Jésus entouré de la diversité de la nature”, une illustration adaptée au Mesotes mais non point au Rédempteur Divin. Son contact mystique avec les lions blancs la ramena au coeur numineux de la sagesse indigène, dont les animaux de pouvoir inspirent et soutiennent la psyché humaine.
Adam Kadmon
Au travers du processus de mort de l'ego, les initiés des Mystères apprirent à vaincre la fixation sur l'identité du soi individuel et à réaliser l'identité avec l'espèce, le sens de l'humanité générique. Dans leur vision de l'Anthropos, les initiés Gnostiques contemplaient l'identité humaine dans une forme cosmique et pré-terrestre. (C'est vers la Nébuleuse d'Orion, dans la région de formation dense de jeunes étoiles appelée le Trapèze, que leur regard se portait). Le défi soulevé par cette expérience sublime était de représenter l'humanité originelle par une image concrète. Rappelons ce que le mythe enseigne: Zoé, la première fille de Sophia, implanta epinoïa, le pouvoir de l'imagination, dans la structure biogénétique de l'espèce humaine. L'imagination étant une faculté de perception d'images, il nous faut nous représenter l'humanité, imaginer l'Anthropos de façon picturale, afin de réaliser le plein potentiel de ce don divin. Il est, cependant, plus aisé de le dire que de le faire.
Quiconque aura étudié les enseignements ésotériques Occidentaux, tels que la Rose-Croix ou la Kabbale, aura vu des illustrations de l'Anthropos. Elles se manifestent souvent sous la forme de schémas complexes, incluant des diagrammes du Logos, de l'Ame du Monde, de la Sapientia (Sagesse Divine) et de la déesse Sophia. De telles illustrations sont très communes dans les écrits ésotériques Occidentaux dont le propos est de divulguer les secrets alchimiques du Grand Oeuvre. La plupart de ces images sont relativement grotesques. Certaines représentent l'Anthropos sous forme androgyne, mais très souvent, il est décrit comme un “grand homme”, appelé Purusha dans la mythologie Hindoue. Dans la Kabbale, Adam Kadmon est le nom secret de l'Anthropos. Et non pas Eve Kadmon qui est dans la cuisine en train de préparer le dîner et qui nous inclue peut-être dans le menu. Plaisanterie mise à part, il existe des connaissances authentiques propres aux Mystères dans la notion Kabbalistique d'Adam Kadmon, qui est souvent dépeinte en surimposition de l'Arbre de Vie, le modèle complexe des dix Sefirot (régions de pouvoir) qui constituent l'infrastructure du cosmos. Un des sefirah est appelé Chokhmah, le terme Hébraïque qui a été corrompu dans le nom de la déesse déchue, Sophia Achamoth.
Adam Kadmon est une image androcentrique de l'humanité générique, à peine mieux qu'un icone du narcissisme mâle. Mais l'Arbre de Vie, qui est souvent intégré dans les images de “l'Homme Primordial” est un grand rébus avec des propriétés assez étonnantes. L'Arbre paraît être un modèle visionnaire de la structure moléculaire comparable au Yi King de l'antique Chine. Le Yi King est un ancien système de divination qui utilise 64 hexagrammes (de six lignes), une structure correspondant à la permutation complète des codons à trois lettres de l'ADN. Dans un symbolisme parallèle, mais morphologiquement distinct, l'Arbre de Vie contient 22 chemins qui ont été corrélés aux 22 acides aminés. Le modèle Oriental reflète une ancienne intuition de l'ADN, tandis que le modèle Kabbalistique reflète une intuition correspondante des processus d'élaboration de protéines dans le code génétique. Avec ses épines dorsales parallèles et ses chemins de traverse, l'Arbre de Vie de la Kabbale ressemble à la double hélice. Les permutations géométriques de ce modèle incluent la proportion divine phi (1:1.618) ainsi que d'autres nombres générateurs du canon de la géométrie sacrée.
Les écrits Gnostiques qui ont survécu ne présentent aucun diagramme de ce type mais ils contiennent, cependant, des indices pointant vers les mêmes nombres codés. L'Evangile de Philippe fait rapidement allusion au nombre 64 du code génétique et au nombre zodiacal codé 72, le nombre d'années pour un degré de précession. Soixante-douze est également le nombre moyen de pulsations cardiaques pour l'être humain par minute. Les initiés des Mystères Occidentaux acquéraient des siddhis (facultés occultes) qui leur permettaient d'observer, et d'interagir avec, la structure moléculaire de la matière vivante. L'Anthropos représenté comme un mâle est problématique mais lorsque l'Adam Kadmon intègre l'Arbre de Vie, il est très proche de mettre en valeur le complexe de spore biogénétique de l'humanité générique.
Le troisième point de la trinité de l'écologie sacrée - notre vision de nous-mêmes, l'espèce humaine - pourrait être développée de façon optimale par une approche visionnaire de la génétique, un territoire qui est actuellement sous l'emprise intégrale des Archontes. A ce jour, la double hélice présente le meilleur modèle que nous ayons de l'Anthropos. De par le fait que des segments du génome humain soient patentés par des corporations médicales et pharmaceutiques, notre héritage Sophianique court le risque de devenir une propriété commerciale. La meilleure façon de lutter contre cette emprise insidieuse est de connaître le génome, sa nature, ses processus: de le connaître en imagination et de nous élever contre ceux qui croient qu'ils peuvent le posséder dans le sens légal ou qui peuvent le coopter pour des arnaques théocratiques telles que “la lignée de sang sacré” qui figure dans le Code Da Vinci.
Pas de Compétition
“La connaissance des natures divines est différente de celle de toute autre chose et est exempte de toute opposition”.
C'est une chose de reconnaître que la terre est vivante et intelligente et il en est une autre de comprendre comment il en est ainsi et comment nous pouvons entrer en relation, et même communiquer, avec cette intelligence. La connaissance de Gaïa constitue un défi inégalé sur terre. Lynn Margulis a insisté sur le fait que “rien de mystique n'est impliqué ici (dans la théorie Gaïa); nous ne présupposons aucun dieu ou déesse bienveillante et consciente”. Les initiés des Mystères affirmaient, cependant, que Sophia est bienveillante et consciente (ce qui, d'ailleurs, ne l'empêche pas d'être cruelle et capricieuse) mais personne n'est obligé de les croire sur parole à ce sujet. On pourrait dire que Gaïa ne requiert pas notre croyance mais il se peut qu'elle dépende de notre enthousiasme à apprendre. Le défi pour l'écologie profonde est le suivant: comment pouvons-nous rencontrer Gaïa sans religiosité et sans pseudo-mysticisme et cependant avec l'admiration respectueuse qui sied à une telle présence?
En d'autres mots: comment pouvons nous atteindre à une expérience mystique et promouvoir l'écologie sacrée dans un processus de connaissance supérieure?
Le renouveau de la Gnose requiert que nous nous attaquions au complexe du rédempteur, la pathologie dominante de l'Age des Poissons sans nous faire piéger dans une bataille rangée avec le Christianisme, le patriarcat, les croyances Abrahamiques, les dominateurs, la Croix, les Apôtres, le pape, la Sainte Mère. Une critique n'est pas un assaut. It est entièrement possible de s'attaquer à des croyances, et même de les démolir, sans porter atteinte à la personne qui y adhère. Je pense que c'est ce que les Gnostiques firent et c'est précisément ce qui les rendit si vulnérables. Ils attaquèrent les croyances dans le but d'éclairer et même de protéger les croyants, mais ces croyants attaquèrent leurs interlocuteurs Gnostiques physiquement, souvent avec extrême violence, comme en témoigne le meurtre d'Hypatia.
La tolérance est une qualité humaine précieuse et aucune société ne peut survivre sans elle. Mais que se passe-t-il lorsque la tolérance tolère l'intolérance? L'étude de cette question peut nous aider à prendre conscience comment il fut possible pour le monde Païen, pour lequel la tolérance était la norme, d'être détruit par un nombre relativement restreint d'adhérents à une foi nouvelle et totalement intolérante; et de comprendre également comment il fut possible, des siècles plus tard, à un tout petit groupe de dominateurs, poussés par leur croyance rédemptrice, à détruire les grandes civilisations et les cultures tribales des Amériques.
Imputer la responsabilité de l'état du monde d'aujourd'hui au patriarcat, aux Juifs fanatiques de la Mer Morte, à l'Eglise Romaine, aux idéologues Chrétiens, ou aux Archontes n'est pas la bonne manière de tirer profit de l'héritage précieux des Gnostiques. La critique du complexe du rédempteur n'est pas un tribunal d'accusation. C'est un exercice de discernement spirituel. Considérée avec justesse, la vision Gnostique n'est pas un vecteur de polarisation. La prise en considération totale de la condition humaine par les Gnostiques était définie par leur refus de la dualité Perse, le paradigme Zoroastrien qui dresse Ahura Mazda contre Ahriman, les Gentils contre les Méchants. Dans Nature et Madness, Paul Shepard évoque ce problème par une observation des plus précieuses: “Le dualisme Perse aida les Chrétiens à transformer toute ambiguïté en opposition plutôt qu'en métaphore”.
Le discernement vécu et authentique Gnostique ne bataille pas sur les absolus mais il ne se vautre pas non plus dans les ambiguïtés. Dans la théologie de la libération Gnostique, toute nuance du problème du mal est examinée, chaque variation métaphorique est maintenue flexible afin que nous ne soyons pas enfermés dans des conclusions rigides et polarisées. La beauté d'un raisonnement humain sain réside principalement dans sa souplesse. Les Gnostiques n'argumentaient jamais entre eux. Il n'existe qu'un exemple connu (dans Pistis Sophia) d'une remarque hostile d'un groupe vis à vis d'un autre groupe. Cela a du être relativement exaspérant pour les telestai d'en venir à débattre de théologie et d'éthiques avec les Chrétiens primitifs. C'était sûrement pour eux un territoire nouveau et peu familier. On ne sait pas, bien sûr, quelle fut l'ampleur des débats réels. Cela ne fut pas très étendu, vraisemblablement. Les polémiques des Pères de l'Eglise étaient rédigées à une distance considérable des problématiques et des individus qu'elles attaquaient. Les Pères étaient très inégaux quant à leur capacité de parer et de répondre aux arguments, ou arguments supposés, de leurs opposants absents. Les arguments de Tertullien sont de toutes évidences schizoïdes et les réfutations d'Irénée ne réfutent rien du tout. Le polémiste le plus articulé fut sans doute Origène qui fut éventuellement condamné comme hérétique lui-même! Il ne saurait être question de nos jours de réchauffer ces arguments. Il n'existe pas de compétition entre l'illumination Sophianique et la croyance religieuse moderne. Et en fait, il n'y en eut jamais. Ainsi qu'Imablichus l'affirma: “La connaissance des natures divines est différente de celle de toute autre chose et est exempte de toute opposition”.
La vision sacrée de la terre est vécue ou elle ne l'est pas, elle est partagée ou elle ne l'est pas. Mais cette vision elle-même ne peut être ni réfutée ni débattue.
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