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Crabe: Vajrayogini

John Lash

Traduction de Dominique Guillet

Cycle lunaire 2009: commence en le 23 juin avec le croissant lunaire de coucher de soleil dans le CRABE - finit le 22 juillet avec la nouvelle lune à 120 ECL dans le CRABE, sur le côté droit.



Image typique de Vajrayogini, appelée également Vajravarahi, la dakini à tête de sanglier. Elle est considérée comme le véhicule suprême du Tantra Yoga le plus élevé.

Certains d’entre vous en viennent peut-être à se demander si “toutes ces petites nanas Tibétaines ne se ressemblent pas un peu, telles des catins racoleuses lors d’un séjour au Cub Med”. On pourrait en dire tout autant des Mahavidyas: à l’exception de petits détails iconographiques précis, elles se ressemblent toutes plus ou moins. Les Dakinis, tout aussi bien que les Mahavidyas, sont des stéréotypes visuels de la puissance féminine, des images archétypiques de Shakti, le Divin Féminin. Quelles sont, après tout, la valeur et la pertinence de ces visualisations?

Le Nexus des Shaktis est une explosion en 18 projections du Divin Féminin, quelle que soit la manière dont vous le visualisez. Les images des devatas - Mahavidyas (1 - 10) et Dakinis (11-15) avec une instructrice sublime (16), une gardienne dangereuse (17) et l'immensité de présence lucide de Gaïa-Sophia elle-même (18) - dérivent de matériau reçu, à savoir la tradition de la déesse de sources Hindoues et Tibétaines. Elles pourraient être décrites comme 18 canaux d’énergie sans référence à des détails visuels quelconques, sans même la visualisation d’une forme féminine.

S’il est vrai que ces stéréotypes proviennent du passé, le Nexus des Shaktis, quant à lui, n’en est pas un produit. On ne peut pas, à partir du passé, en retracer l’émergence bien que l’on puisse y retrouver certaines préfigurations. Le Nexus des Shaktis est strictement actuel, immédiat, présent. Certains précédents, dans les religions Hindoues et Tibétaines, préfigurent sa manifestation présente, pourrait-on dire, mais le Nexus est essentiellement novateur, intrinsèque à ce moment du temps historique. J’ai suggéré, dans un essai d’introduction au Tantra Planétaire, que les images visuelles utilisées pour le Nexus sont telles des hôtesses vêtues dans des costumes conventionnels accueillant des invités. Les hôtesses du Nexus des Shaktis portent deux types d’accoutrements: pour les Mahavidyas, les parures kitsch Hindoues avec le sari et les bijoux, et, pour les Dakinis nues, la couronne de cinq crânes, la lame fustigeante, et la coupe en crâne emplie de sang ou de cerveau, les boucles d’oreilles et les colliers, les guirlandes de têtes coupées et les ceintures d’os.

Pour introduire le Nexus des Shaktis, j’ai recours à toutes ces images mais je ne considère pas qu'il soit important de les conserver. Le Nexus est une éruption dans l’imagination religieuse de l’espèce humaine. En tant que telle, il se révèle initiallement au travers d’un matériau pré-existant. Il s’inspire des visualisations du Divin Féminin qui existent dans le réservoir de l’imagination humaine. Mais, en fin de compte, il ne se réduit pas à ces images. Il les transcende et il les dépasse, ou il en sera ainsi bientôt. Je n'insiste sur le recours à de telles images que pour leur puissance d'évocation et pour l'opportunité qu'elles offrent de prendre connaissance de certains attributs et de certaines qualités de Gaïa Shakti, la puissance planétaire féminine qui est également appelée sagesse, Sophia. Lorsque vous vous familiarisez avec ses fréquences, Shakti-Sophia s'installe dans votre imagination selon les voies qui vous sont les plus propices et elle intensifie votre connexion avec elle. En fait, Gaïa se configure elle-même dans l'imagination de chaque personne sur terre d'une manière totalement unique. Le Nexus des Shaktis non seulement prépare l'individu pour cette configuration, mais il est, de plus, la quintessence intégrale qui accompagne et qui unifie toutes les expériences mystiques directes de la présence de Gaïa.

Tara: associée spécifiquement avec Aldébaran, l'étoile dorée massive dans l'oeil du Taureau. Depuis les années 70, les astronomes savent que la ligne de vision de l'étoile de l'oeil du taureau (72 ° de l'écliptique) indique la direction de l'ALG, l'Apex du Groupe Local). Cet apex est le point vers lequel les 24 galaxies de groupe local, dont fait partie notre galaxie, convergent, en contraste avec la dispersion collective ou la fuite de toutes les galaxies dans toutes les directions de l'espace cosmique. Tara la Sélectrice tient cette direction.


Lumière Primordiale



La devata qui préside à ce cycle lunaire est Vajrayogini, connue également sous le nom de Vajravarahi, la Truie Adamantine ou la Truie de Diamant. Varahi signifie truie, cochon, sanglier. Vajra signifie diamant, cristal, adamantin. Tous ces termes font référence à quelque chose qui est extrêmement dur. Représentée sous la forme d’une dakini à tête de sanglier ou truie adamantine, Vajrayogini est rarement dépeinte avec une tête de sanglier. Une recherche sur Googles Images sera infructueuse quant à la découverte d’une image d’une dakini avec tête de sanglier mais ces représentations existent cependant, plus généralement sous la forme de sculptures que de peintures et de thangkas. Des représentations humaines de Vajravarahi incluent le motif animal sous la forme d’un petit sanglier qui surgit derrière l’oreille droite de la dakini.

La tête de sanglier et la qualification de truie adamantine font référence à deux expériences mystiques distinctes de puissance surnaturelle en présence de la Déesse suprême Devi ou Shakti. Il est impossible de déduire logiquement ce que ces allusions signifient ou de les approfondir au travers d’une analyse des représentations religieuses ou artistiques; il faut en passer tout d’abord par l’expérience directe qui les a générées. Les deux motifs font référence à l’expérience de la lumière primordiale, la radiance à la source de tout ce qui existe, à la fois sur le plan mental et sur le plan physique. C’est une radiance réfléchissante appelée en terminologie Shakta
vimarsha. Elle est réputée être le miroir dans lequel la présence suprême, Shiva, se contemple lui-même.

Dans mon recouvrement du mythe Gnostique de la déesse déchue, j’ai décrit l’Eon Sophia comme un torrent de luminosité vivante. En partie, l’Eon se matérialise et se métamorphose dans les éléments sensoriels de la terre, de l’air, du feu et de l’eau mais, en partie, elle reste dans sa forme originelle de luminosité immatérielle, la Lumière Organique. J’ai proposé d’appeler la Lumière Organique son corps de substance primordiale et la terre son corps planétaire. Ce faisant, j’ai suivi étroitement les enseignements Shaivites et Shakta quant à la lumière réfléchissante primordiale de vimarsha. Les Shaktas, ou dévots de la Déesse de Sagesse, appellent l’Eon Sophia la Shakti Adya, “la puissance féminine fondatrice suprême”. La puissance est une présence; exprimé autrement, on peut être présent à cette puissance. Une rencontre directe et intime avec cette puissance révèle qu'elle possède deux qualités, une douce et une dure. Il existe une lumière dure, de la nature du diamant, qui possède en elle le mouvement du flux de la pluie et une luminosité blanche et douce, la Lumière Organique, qui imprègne toute matière. La Lumière de Diamant est au-delà de l’expression matérielle alors que la Lumière Organique réside en la matérialité. Elle imprègne la masse solide.

Rien de ce que j’affirme présentement n’est abstrait ou théorique. Tout peut être expérimenté directement et la confirmation de ces expériences peut se retrouver au travers des enseignements Hindous Shaktas, dans le Shivaïsme Kashmiri et dans le Tantra Tibétain.

Le motif du sanglier fait référence à l’expérience directe de la Lumière de Diamant tandis que le motif de la truie fait référence à l’expérience de la Lumière Organique - pour autant que je puisse dire. C’est, du moins, mon interprétation privilégiée de la dérivation de ces termes. Le sanglier que l’on voit émerger de l’oreille droite de Vajrayogini peut également faire allusion au son particulier qui est perçu lorsque l’on est intégralement immergé dans la Lumière Primordiale: un effet de glouglou et de tunnel qu’un psychonaute de mes amis décrivit comme se manifestant lorsque “vous pénétrez dans ses tuyaux d’échappement”. Chacune des cinq Dakinis de Ciel de Diamant entourant VV est corrélée à une faculté sensorielle: Vajrayogini l’est au sens de l’ouïe.

Quant à l’imagerie de la mère truie, elle rappelle l’effigie Gnostique de Diane d’Ephèse:


Ainsi que je l’ai souligné dans la seconde galerie Gnostique, les représentations graphiques et statuaires de la Lumière Organique sont extrêmement rares. Mais on ne peut se méprendre sur celle-là. Elle doit procéder d’une expérience directe: en contemplant la Lumière Organique, on ressent souvent comme si on tétait des seins emplis de lait. La luminosité spirale vers vous en vortex immenses et nacrés ou en cônes tourbillonnant majestueusement qui rappellent des coquillages mais également des seins bombés. Vous pouvez réellement goûter la Lumière Organique sur vos lèvres. Ce n’est pas uniquement mon ressenti mais cela m’a été reporté par d’autres psychonautes de ma connaissance.

Danse de LIberté

Il existe donc deux impressions de la Lumière Primordiale, vimarsha, le miroir dans lequel la conscience pure sans sujet ou sans objet se contemple elle-même. Miranda Shaw écrit dans Buddhist Goddesses of India que “Vajrayogini est sans conteste la déesse suprême du Tantra Yoga le plus sublime”. Elle l’est certainement parce que ses attributs font directement référence à l’expérience mystique ultime de la Lumière Primordiale dans ses modalités douce et dure, les deux à la fois. Elle est, dirons-nous, la gardienne et l’intercesseur de cette Lumière. Pour l’exprimer autrement, cette dakini adombre la présence de cette luminosité sublime et la “distribue” dans le flux mental - ou plus précisément, dans le champ de l’attention ouverte, de la contemplation pure. Elle maintient votre attention vis à vis d’elle. C’est un pouvoir yoguique suprême, assurément.

Shaw dit également de Vajrayogini que “sa danse est liberté pure”. La contemplation directe du medium dans lequel l’univers se reflète est la liberté de l’illumination. Mais cette Dakini de Ciel de Diamant ne maintient pas simplement l’attention vis à vis de cet état, elle pénètre également dans l’état de non illumination et se connecte aux passions humaines selon des voies plus immédiates et plus atrocement intimes que toute autre devata. Miranda Shaw écrit:

“Il est communément affirmé de Vajrayogini que ‘son essence est immense passion’. ‘L’immense passion’ (maharaga) dénote une ‘passion transcendante’ raréfiée ou ‘passion divine’, libre d’auto-référentiel ou d’expression égoïste et maléfique. Ayant transcendé l’égoïsme et l’illusion, elle peut accéder à sa passion dans sa pureté sacrée et la diriger vers la libération d’autrui... Sa ‘passion et sa concupiscence cosmiques’ possèdent une dimension de compassion car ‘libérées du besoin de saisir, elles deviennent une force d’expansion et de communication’. Elle “soutient simultanément le bien-être d’autrui tout en s’embrasant pour détruire les inclinations névrosées de l’ego’.” (les citations internes sont de Chogyam Trungpa, le maître Tibétain dont le style et le message préfigurent très clairement le Kala Tantra).

Ce paragraphe contient les motifs essentiels pour l’harmonisation avec l’instruction de dakini durant le cycle lunaire présidé par Vajrayogini. Une partie de l’art le plus élevé du Tantra peut être apprise durant ce cycle. Le style de Vajrayogini est vif et impitoyable, presque rapace dans la manière dont elle élimine l’illusion et les fixations de l'ego. Je dirais qu’elle s’embrase au travers du territoire non circonscrit de l’ego comme nulle autre devata. Elle offre des moments de liberté, à vous couper le souffle. Alors que Bagalamukhi vous fera tourner autour d’un obstacle de sorte que ce qui vous bloque à un moment se retrouve derrière vous au moment suivant, Vajrayogini va simplement vous le faire exploser au visage. Elle libère le mental et les émotions dans des moments stupéfiants de liberté totale.

Tout n’est que jeu pour l’acte de libération procédant de Vajrayogini:

“De par l’intégralité de son être, Vajrayogini possède toutes les modalités émotionnelles à sa disposition et elle y a recours à volonté. La plupart des divinités n’ont qu’une expression faciale proéminente alors que l’apparence de Vajrayogini se décline avec un registre complexe d’émotions. Son expression faciale peut être décrite comme extatique, érotiquement ravie, intensément courroucée... et elle peut également exhiber un mélange d’humeurs... ‘elle est imprégnée d’un complexe de courroux et de passion, dans la plénitude de l’extase, riant et montrant ses crocs’. Même dans une humeur extatique, cependant, elle est généralement dépeinte avec des incisives aiguisées évoquant sa férocité et la qualité omnivore du chemin Tantrique, qui requiert que l’on confronte et transforme - ‘digère’ pour ainsi dire - toute expérience se manifestant sur le chemin de l’illumination” (ibidem).

Elle va montrer ses crocs. Et la vérité surgira. En tant que gardienne suprême et divinité tutélaire du Yoga Tantra le plus élevé (la huitième phase, juste avant l’Atiyoga), elle est une libératrice sublime. Bagalamukhi nous libère des obstacles vers l’auto-réalisation. Vajrayogini nous libère de l’auto-référentialité. (ainsi que Shaw le souligne ci-dessus).

Observation: J’écris ces notes le vendredi 26 juin 2009, le jour 4 du cycle de Vajrayogini. La nuit dernière sur la terrasse de ma maison en Andalousie, j’observai, avec un ami Tantrique, le croissant lunaire de coucher de soleil qui indique sa prise de relève. J’avais déjà eu, lors du second jour du cycle, une intuition d’instruction de dakini qui complétait un enseignement que je reçus en mars durant le cycle de Chinnamasta. Je fus incapable de reporter l’instruction de Chinnamasta, et je ne l’ai pas encore fait, en raison de la nature radicale, innovatrice et extrêmement étonnante de cette instruction. Il est intéressant de préciser qu’il existe une forme auto-décapitante de Vajrayogini qui reflète l’acte de Chinnamasta. Je pense qu’il en est ainsi parce que cette Mahavidya et cette Dakini de Ciel de Diamant sont en complicité pour conférer le principe ou la loi ultime du Kala Tantra pour cette époque. Ce principe n’a jamais été stipulé auparavant. Ce n’est pas un secret perdu mais un principe cosmique qui est perpétuellement redécouvert de manière différente chaque fois. C’est une révélation de l’Eveil de Gaïa unique à ce moment du temps, juste maintenant.

Avec le flash d’instruction de Vajrayogini, je peux dire finalement ce qu’est le Tantra, ce que ce terme va éventuellement signifier en termes Gaïens, relativement aux biophysiques actuelles de la planète. Cette révélation me stupéfie et va sans doute en stupéfier d’autres. Nous verrons cela plus tard. Cette définition du Tantra procède directement de Vajrayogini, au travers de mon instruction. Et elle convie la marque de son mode de révélation: stupéfier le mental et s’embraser au travers de tout ce qui bloque la conscience humaine sur le chemin de la liberté totale.

Quelques Points Forts du Cycle de Vajrayogini

Je préfère le terme auto-implication à auto-référentialité. C’est la fixation primordiale du narcissisme, la pathologie psychique terminale qui devient pandémique à la fin du Kali Yuga. L’auto-implication est la préoccupation exclusive avec ce qui affecte un individu sans considération aucune de ce qui affecte autrui. Cela signifie qu'aucune considération n'est portée quant à la manière dont la personne auto-impliquée affecte autrui ou même quant à la manière dont autrui est affecté par quoi que ce soit. De nombreux comportements témoignent, de façon flagrante, de cette sorte d’auto-implication inhumaine. Normalement, nous qualifions de tels comportements d’attitudes ou d’actes égoïstes ou centrés sur soi-même. Par exemple, un ami supposé ne témoigne d’aucune préoccupation pour la mort de votre chat. Un exemple banal qui pourrait être multiplié par des milliers. Il y a ensuite des exemples non banals: une personne que vous connaissez et aimez ne témoigne d’aucun intérêt pour ce que vous cherchez à réaliser dans votre vie. Cet ami n’est intéressé que par la manière dont vous l’affectez. L’auto-implication est le fondement de l’utilisation et de l’abus, du contrôle et de la manipulation des autres de sorte qu’ils ne nous affectent qu’en fonction de nos souhaits.

Je privilégie le terme d’auto-implication parce qu’il indique qu’une personne égoïste est impliquée ou emmêlée dans quelque chose qui fait obstacle à son implication avec autrui. Dans une situation harmonieuse, nous, les êtres humains, nous nous impliquons les uns avec les autres. Il est possible que nous le fassions avec des maladresses et avec des erreurs, ou que nous nous impliquions beaucoup trop, mais le désir primordial de se connecter et d’être “alter-impliqué” est sain et gratifiant. L’amour est l’implication dans la vie d’autrui. La sur-implication est appelée co-dépendance et c’est une tendance prévalente de notre époque. Mais la co-dépendance de sur-implication provient toujours d’une auto-implication initiale qui n’est pas perçue ou admise. Les gens sont co-dépendants parce qu’ils estiment égoïstement qu’ils en tireront profit, que cela sera bénéfique à leur auto-implication et à leurs besoins égoïstes d’une façon ou d’une autre. Le co-dépendant abandonne le soi afin d’obtenir quelque chose pour le soi - un échange malsain pour tous ceux qui sont concernés. Les deux comportements sont donc étroitement corrélés et peuvent se renforcer mutuellement.

Certains individus, néanmoins, peuvent résister fortement à la co-dépendance: leur auto-implication est à ce point profonde et complexe qu’ils ne peuvent pas s’engager, assez avec un autre individu, pour développer ou exprimer des attitudes de co-dépendance. Une auto-implication extrême engendre des comportements qui isolent la personne auto-impliquée et qui désolent tout autre personne tentant de se connecter avec elle. L’isolement est la plaie sociale et émotionnelle la plus grave de notre époque. C’est un symptôme clair du virus global de narcissisme. Je définis le narcissisme comme la considération de soi excessive fondée sur l’absence d’un sens authentique du soi. Sans un sens authentique du soi, vous ne pouvez pas vous connecter sincèrement et ouvertement avec autrui et vous sombrez dans un trou noir d’auto-considération. Tel est le paradoxe essentiel du narcissisme.

Comment Vajrayogini intervient-elle donc dans ce tableau? Je dirais qu’elle est la devata qui opère le plus profondément sur le territoire de l’auto-implication, parce que le moment de l’illumination engendre une libération intégrale vis à vis de l’auto-implication. La réalisation directe de
shunyata, la Vacuité, se manifeste au travers de la prise de conscience que rien ni personne n’est isolé. Vous et moi n’existons qu’en relation, impliqués avec autrui et reflétés par autrui. Et l’autre n’est pas simplement vous, là-bas, bien que ce soit un reflet de vous. Dans la vacuité libératrice de la conscience illuminée, vous n’existez que dans le flux immanent des relations. La vacuité n’est pas un vide mais une contingence absolue. Il est impossible de refléter quoi que ce soit lorsque vous êtres totalement auto-impliqués. Vous pouvez regarder, disons, dans les yeux d’un chaton et ne rien voir, ni autre chose, ni un autre être, ni une autre conscience.

Afin d’être reflété dans le regard d’un autre, il vous faut prendre conscience qu’ils sont l’altérité. L’un et l’autre sont à l’unisson mais ils ne constituent pas une unité ni une seule et même chose. C’est la merveille de l’unité: c’est l’unification, le reflet ou la fusion de deux choses ou de deux êtres différents. Vajrayogini enseigne la réflexion et le chemin hors de l’auto-implication. C’est le coeur de son instruction sacrée.

La Mesure de la Compassion

La manière dont elle le fait est réellement fascinante, à mon avis. Elle utilise le plaisir et la passion pour extirper le soi de son auto-implication. La passion, et qui plus est la passion extrême, constitue l’outil le plus efficace de sa panoplie. Une passion extrême va libérer un individu de son auto-implication lorsque rien d’autre ne le fera. La nature de la passion est de surgir et de se développer et de s’épandre sans limites. C’est également la tonalité ou la signature dynamique du CRABE. Cette petite constellation amorphe donne l’impression d’une nébuleuse spirale qui s’étend devant vos yeux.

L’unité du désir et de la compassion est l’instruction dominante de Vajrayogini. Le désir de faire plaisir à une autre personne, par exemple, est une force assurée de défaire l’auto-implication.

“Le désir est la mesure de toute compassion”. C’est l’un des cinq principes du Kala Tantra. C’est de la syntaxe dakini, un enseignement rigoureux et exact.

Cet enseignement signifie que la manière dont vous vivez et dont vous exprimez votre désir témoigne de la manière dont votre compassion opère. La compassion est la capacité de ressentir comment un autre est affecté, soit par ce que vous faites ou par quoi que ce soit. Ressentir ce que l’autre ressent, ce n’est pas ressentir pour lui (ce qui est de la co-dépendance) mais avec lui: com signifie avec; ou encore mieux, au travers de lui. Vous pouvez blesser quelqu’un et cependant ressentir de la compassion pour lui tant que vous reconnaissez ce qu’il ressent dans sa blessure. La compassion n’est pas un état d’être au-delà de la capacité de blesser autrui ou de lui nuire, soit intentionnellement, ou de quelque autre manière. C’est l’attitude de responsabilité totale vis à vis de la manière dont vous affectez autrui. Mais ce n’est pas la responsabilité pour ce que les autres font de cet affect. Comment ils le reçoivent ou comment ils le gèrent. Ceci est de leur responsabilité.

La compassion en termes Kalika n’est pas une approche altruiste ou transpersonnelle de la vie: elle est désidérative, fondée sur le désir. L’objection évidente à l'ethos hédoniste, fondé sur le plaisir, du Kala Tantra est la suivante: si vous ne faites que ce que vous désirez, et ce qui vous plaît à vous-seul, vous allez ignorer égoïstement les autres et comment vous les affectez. Mais selon l'enseignement Kalika, vous ne pouvez pas faire de bien à autrui, quel que soit ce que vous pensiez que vous leur faites, tant que votre compassion ne procède pas de votre désir.

Par exemple, supposons que je désire vivre dans un chalet sur le Lac Genève et passer mon temps à faire du ski nautique. Ce désir, tel que je l’exauce avec pour témoins ceux que mon action affecte, est la mesure de ma compassion pour autrui. Il n’est que peu de compassion chez quelqu’un qui désire faire du ski nautique sur le Lac de Genève. C’est clair. Si je désire vivre dans une maison gigantesque, telle que celles que possèdent les stars de cinéma, ce désir est la mesure de ma compassion pour l’humanité. L’intensité du désir pour mon propre luxe et mon confort est la mesure de ma compassion. Que reste-t-il comme place pour la compassion lorsque le désir pour l’auto-gratification est à ce point immense, reflété dans la taille d’une maison? Il est vrai que les gens qui s’auto-gratifient à ce point réalisent de bonnes choses, soutiennent des oeuvres caritatives, défendent des causes au nom de la compassion et ainsi de suite. De telles personnes, ainsi, disent souvent qu’ils redonnent pour les privilèges et les excès dont ils jouissent. Mais aucun acte de compensation n’est réellement de la compassion. La compassion est totalement gratuite, aussi indépendante des résultats et des récompenses qu’elle l’est de conditions primaires telles qu’avoir de meilleures conditions matérielles qu’autrui dans la vie. Le privilège et le luxe ne sont pas des opportunités pour la compassion. Et la pauvreté et les privations ne le sont pas plus. Il n’existe pas d’opportunité pour la compassion si ce n’est dans la connexion avec autrui et dans la prise de responsabilité pour reconnaître et admettre la manière dont nous les affectons, positivement ou négativement.

Traditionnellement, dans le Bouddhisme, la compassion n’est concernée que par la souffrance. On nous parle sans cesse des actions et des considérations empreintes de compassion des Bouddhas en réponse à la souffrance de tous les êtres vivants. Mais dans le Kala Tantra, la souffrance n’est pas la pierre angulaire de la compassion: c’est le désir qui l’est. Et puisque le désir cherche naturellement le plaisir, cherche à se faire plaisir lui-même, le plaisir est le test de la compassion. C’est la manière dont vous trouvez votre plaisir qui témoigne de votre compassion et non pas ce que vous faites pour soulager les souffrances d’autrui - à moins que cela vous donne du plaisir. Les Kalikas soutiennent qu’en cherchant leur plaisir le plus intense, ils feront plus pour soulager la souffrance d’autrui que s’ils l’adoptent en tant que mission. Cette mission, exprimée dans le Voeu du Bodhisattva, est totalement passéiste et dénuée d’intérêt à l’approche de la fin du Kali Yuga. Il est ridicule de lutter pour la libération de tous les êtres sensibles de la souffrance. Essayez de libérer juste un être sensible si cela est votre inclination réelle. Mais les Kalikas disent: faites juste ce qui vous plaît le plus et SI vous éprouvez réellement de la compassion pour autrui, votre plaisir lui-même aura un effet libérateur et soulageant.

Pour un Kalika incliné vers la libération au travers du désir plutôt que du désir, toutes les transactions humaines de nature honnête et authentique sont négociées sur la base du plaisir partagé.

Le Tantra est un pacte de plaisir. Vous pouvez renouveler ce pacte, de façon permanente, avec tout un chacun et toute chose, toute personne que vous rencontrez, tout animal, toute plante, tout minéral et toute étoile. Le propos du Voeu de Tantra Gaïen est de passer ce pacte avec la Terre elle-même. C’est un pacte à trois voies entre deux personnes et Gaïa. La finalité du pacte de plaisir de deux personnes, la dyade fondamentale du Tantra, est de libérer les deux individus au travers de l’expérience de leur plaisir le plus élevé.

Ce n'est pas une instruction de dakini, juste ma compréhension modeste de l'enseignement sur l'unité du désir et de la compassion qui procède de Vajrayogini.

John Lash. 26 juin 2009. Andalousie.

Traduction de Dominique Guillet.